• Le CSA publie son Baromètre Diversité et Égalité : genre, origine perçue, âge, catégorie socioprofessionnelle et handicap sont passés au crible.
  • 644 heures de programmes et 82. 961 intervenant.e.s ont été étudiés.
  • Certains paramètres de l’égalité et de la diversité poursuivent les évolutions déjà amorcées précédemment ou amorcent des transformations. Il n’y a pas de bouleversements mais plutôt des évolutions qui se mesurent en « saut de puces ».
  • En revanche, d’autres critères de l’égalité et de la diversité stagnent voire reculent alors même que l’on pensait les changements impulsés. Le Baromètre pointe notamment une diminution de la représentation de la diversité des origines à l’écran, une sous-représentation des femmes et un tabou qui persiste autour de l’intégration du handicap et de certaines catégories d’âge dans les programmes télévisuels.
  • Au regard de certains résultats, qui se répètent au fil des Baromètres, le CSA ouvre la réflexion sur la pertinence de prévoir des objectifs plus précis avec le secteur.

 

Cinq années après la publication du Baromètre 2013, les résultats du screening télévisuel opéré par le CSA n’annoncent pas de révolution structurelle. Si on observe certaines tendances encourageantes, on note aussi un certain nombre de dégradations. Et on est interpellé par les constats qui persistent au fil des analyses.

Il s’agit sans doute l’information principale du Baromètre Diversité et Égalité 2017 : la diversité à l’écran continue d’être sous- ou mal représentée, malgré certaines évolutions qui viennent nuancer les résultats. Loin de vouloir donner des bons ou mauvais points au acteurs du paysage audiovisuel, le CSA ouvre néanmoins la réflexion sur la mise en place de mesures plus précises, dans l’espoir que les prochains Baromètres puissent enfin amorcer des changements réels.

 

La représentation des femmes : des résultats nuancés

 

De 2011 à 2013, on observait une augmentation continue de la présence des femmes à l’écran. En 2011, les femmes représentaient 31,41% des intervenantes dans les programmes télévisuels. En 2013, ce pourcentage était de 36,88%. En 2017, la présence des femmes diminue à 34,33%. Si un certain nombre de paramètres contextuels viennent nuancer cette baisse dans le Baromètre, ce chiffre reste nettement inférieur à la présence réelle des femmes dans la société belge estimée à 51%[1].

À côté des considérations quantitatives, le Baromètre s’est penché sur les programmes dans lesquels apparaissent les femmes et sur le rôle qu’on leur attribue dans ces émissions.

Un certain nombre de constats apparaissent encourageants. Parmi ceux-ci on mentionnera :

Dans les programmes d’information, la proportion de femmes poursuit une augmentation continue : de 30,42% dans le Baromètre 2011 à 37,28% pour l’édition 2017. Le rôle médiatique dans lequel les femmes sont les plus représentées est celui de journaliste-animatrice puisque 43,25% des personnes répertoriées dans ce rôle sont des femmes. Et si l’on dissocie les journalistes et les animatrices, la proportion de femme dans le rôle de journaliste est de 44,63%. C’est une progression de 6,44% par rapport à 2013. Les femmes sont aussi un peu plus fréquemment représentées dans les rôles discursifs socialement valorisés de porte-parole (28,23%, soit +5,02% par rapport à 2013) et d’experte (20,56%, soit +1,73%).

Néanmoins, un certain nombre de facteurs viennent nuancer ou contrebalancer ces évolutions.

Tous les rôles médiatiques sont majoritairement masculins. Les femmes revêtent toujours plus fréquemment le rôle de « vox populi » (39,54%) que de porte-parole (28,23%) ou d’experte (20,56%). Ainsi, elles apparaissent davantage dans le registre de l’affect, du « pathos » que du discours critique. Lorsque les femmes sont présentées dans le rôle de journaliste, elles sont davantage au second plan de la mise en scène de l’information (46,95%) qu’au premier plan (36,00%). Enfin, lorsqu’elles prennent la parole à l’écran, les femmes apparaissent toujours plus fréquemment que les hommes sans aucune mention identitaire (nom, prénom, profession). Parmi les hommes, 26,94% ne font l’objet d’aucune mention contre 39,94% pour les femmes.

 

La diversité d’origine diminue

 

En dépit de quelques évolutions, le changement qui semblait amorcé en 2013 du point de vue de la représentation de la diversité des origines dans les différents genres de programmes ainsi que dans les rôles médiatiques socialement valorisés connaît un coup d’arrêt.

En 2017, les intervenant.e.s perçu.e.s comme issu.e.s de la diversité représentent 14,39% des individus encodés. Il s’agit d’une diminution de 2,59% par rapport au Baromètre 2013 (16,98%).

La diversité a chuté dans tous les genres de programme : -6,98% dans la fiction, -4,50% dans l’information, -4,22% dans les magazines et documentaires et -3,27% dans le sport, et ce en dépit de l’augmentation du nombre total d’intervenant.e.s dans tous ces genres respectifs.

L’information et les magazines-documentaires font partie des types de programmes dans lesquels il y a le moins de diversité des origines. En effet, dans l’information, les intervenant.e.s issu.e.s de la diversité représentent 11,31% du total des individus encodés.

Dans le rôle de journaliste – animateur.trice la proportion de personnes issues de la diversité a diminué de 6,16% de 2013 à 2017 (elle est passée de 9,94% à 3,78%). Dans le rôle d’expert.e, la proportion de personnes issues de la diversité est de 7,74% en 2017 (soit -0,36% par rapport à 2013). La progression enregistrée de 2011 à 2013 ne s’est pas poursuivie.

Les personnes issu.e.s de la diversité sont toujours davantage représentées dans le rôle de vox populi que de porte-parole ou d’expert.e : elles sont 13,18% dans le premier rôle contre 7,74% d’expert.e.s et 8,70% de porte-paroles.

– Le genre de programme qui laisse le plus de place à la diversité est le sport : 22% des individus encodés dans ce genre sont perçus comme issus de la diversité.

 

Un tabou autour du handicap ?

 

Les personnes en situation de handicap représentent 1,48% des intervenant.e.s.

Le mode de représentation des personnes en situation de handicap à l’écran, ne présente pas d’évolutions de 2011 à 2017.

En effet, les personnes en situation de handicap se concentrent systématiquement dans les rôles passifs de figurant.e et affectifs de vox populi. Elles sont exclues des rôles d’expert.e et de candidat.e à un jeu, c’est-à-dire de la parole d’opinion mais aussi du rêve et de l’univers hédoniste. Au fil des analyses elles sont régulièrement associées au marqueur social handicap : dans près de 4 cas sur 10 (39,96%), les personnes en situation de handicap sont sollicitées précisément en tant que personne handicapée dans un sujet relatif au handicap.  Enfin, elles sont plus fréquemment passives à l’écran que les personnes qui ne présentent pas de handicap visible.

 

Jeune cadre dynamique, bienvenue !

 

Le Baromètre s’est aussi penché sur les critères relatifs à la catégorie socio-professionnelle et à l’âge des intervenant.e.s.

En matière de distribution des catégories socio-professionnelles, les constats du Baromètre 2017 confortent les tendances déjà observées précédemment, en l’occurrence : la surreprésentation des catégories socio-professionnelles supérieures et la nette sous-représentation des professions manuelles, peu qualifiées et des personnes inactives. Néanmoins, des ajustements s’opèrent.

Les catégories socio-professionnelles supérieures (c’est-à-dire les cadres, dirigeant.e.s, professions intellectuelles et scientifiques – dont les professionnels des médias et les artistes) sont toujours les plus représentées : elles totalisent 44,71% des intervenant.e.s dont on a pu identifier la profession. Toutefois, il s’agit d’une diminution de 8,25% par rapport à 2013. Cette tendance va à contre-courant de ce qui avait été observé jusqu’ici dans les Baromètres.

Concernant l’âge des intervenant.e.s : la catégorie des 19-34 ans rassemble 32,67% des individus encodés dans l’ensemble des programmes. Il s’agit donc de la tranche d’âge la plus représentée à l’écran. En outre, elle est 1,6 fois plus présente à l’écran que dans la population belge (20,00% au 1er janvier 2017). La tendance au « jeunisme » dans les représentations télévisuelles est une constante au fil des Baromètres. Toutefois, cette tendance diminue. Les 19-34 ans représentaient en effet 43,73% des intervenant.e.s en 2013. La diminution concerne les programmes pris dans leur ensemble et, plus spécifiquement, les programmes d’information.

En revanche, les personnes âgées de 65 ans et plus sont près de quatre fois (3,95) moins présentes dans l’échantillon de programmes que dans la société. Elles constituent en effet 4,68% des intervenant.e.s dont on a pu identifier l’âge, contre 18,50% dans la société belge (au 1er janvier 2017). La sous-représentation des personnes de 65 ans et plus est une constante des différents Baromètres. En outre, lorsque cette catégorie d’âge est représentée, les modalités de sa représentation sont fréquemment problématiques (rôle médiatique, mention de l’identité).

 

Quid du prochain baromètre ?

 

À quand des changements significatifs dans les prochains Baromètres ?

La régularité de certains constats au fil des Baromètres devient une information en soi. Les lignes de force ne semblent pas fléchir. De toute évidence, les stratégies envisagées par les acteurs de l’audiovisuel ne portent pas leurs fruits. Au regard des nouveaux résultats du Baromètre, et cinq années après la publication du précédent Baromètre, il semble urgent de relancer la réflexion, de dépasser les initiatives informelles qui reposent sur la vigilance des uns et des autres et de sensibiliser l’ensemble de la chaîne de production-diffusion audiovisuelle. Et pourquoi pas prévoir d’avancer vers des objectifs plus précis ?

 

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[1] Selon les chiffres de Statbel au 1er janvier 2017.