« Moins de plaintes, mais un engagement constant pour l’égalité entre les femmes et les hommes et la protection des mineur.e.s » 

Le Secrétariat d’instruction (« SI ») est chargé de traiter, de manière indépendante, les plaintes reçues par le CSA. Il veille à apporter à chaque plaignant.e une réponse complète, dans une perspective de transparence, d’accessibilité et d’information des publics. Ce faisant, il est attentif au respect de la réglementation par les médias, et ce au profit, in fine, de l’intérêt général. Les chiffres présentés dans le présent rapport donnent un aperçu de l’ensemble des plaintes adressées au CSA en 2021. 

Par les plaintes auprès du CSA, les publics s’expriment sur des sujets qui les préoccupent : la protection des mineur.e.s, l’information, les discriminations, les discours de haine, les règles régissant la communication commerciale (publicité), l’accessibilité des programmes, ou encore l’atteinte à la dignité humaine. 

 


Les plaintes en 2021 

 

En 2021, 128 plaintes ont été adressées au CSA, soit une diminution (-98 plaintes) par rapport à l’année 2020 (226 plaintes). 

Le nombre de dossiers a, lui aussi, diminué par rapport à l’année précédente  : 109 dossiers ont été ouverts sur la base des plaintes en 2021, pour 180 en 2020 (-71 dossiers). Cette différence entre le nombre de plaintes et le nombre de dossiers s’explique par le phénomène des plaintes multiples  sur un même sujet. En effet, un dossier peut rassembler plusieurs plaintes portant sur un seul et même sujet. Phénomène très marqué entre 2017 et 2019, les « plaintes multiples » ont été beaucoup moins nombreuses en 2020 et en 2021.  

En 2021, un programme a suscité de plus vives réactions de la part des publics  : des propos tenus dans « The John Late Show » diffusé sur LN24 le 14 mai 2021 ont en effet provoqué 9 plaintes auprès du CSA. Les plaignant.e.s dénonçaient des propos tenus par l’animateur de l’émission assimilant les Palestiniens aux Allemands de 1940. Après examen, le SI a estimé qu’aucune incitation à la haine ne pouvait être établie et a classé le dossier sans suite. 

La recevabilité des plaintes : le renversement de la tendance se poursuit 

Pour être considérée comme recevable, une plainte doit (1) ne pas être anonyme, (2) viser un éditeur, un distributeur ou un opérateur établi en Fédération Wallonie-Bruxelles, (3) contenir un grief suffisamment précis et (4) concerner la législation audiovisuelle. 

Ainsi, les plaintes visant les médias audiovisuels de manière générale ou portant sur un enjeu ne relevant pas des compétences du CSA sont irrecevables. Lorsqu’il est saisi d’une telle plainte, le SI adresse une réponse circonstanciée au/à la plaignant.e, l’informe, et veille, lorsque cela est possible, à le réorienter vers les services compétents.  

Avant 2018, les plaintes adressées au CSA étaient majoritairement irrecevables. En 2018, la tendance s’est inversée ; le SI a constaté la compétence du CSA pour examiner 63 % des plaintes reçues. Si en 2019, il y a eu une légère remontée du nombre de plaintes irrecevables (54 %), on constate que depuis 2020, les plaintes sont à nouveau majoritairement recevables  : c’était le cas pour 140 des 226 plaintes reçues en 2020, soit 62 %. En 2021, c’est le cas pour 76 des 128 plaintes reçues, soit 59 %. En d’autres termes, la proportion de plaintes recevables, faisant donc l’objet d’un examen sur le fond, est nettement supérieure à la proportion de plaintes irrecevables. 

Ce changement s’explique notamment par la forte diminution des plaintes visant des éditeurs français. En effet, en 2017, le SI avait redirigé 154 plaignant.e.s vers le CSA français (aujourd’hui « ARCOM »). En 2018, ce chiffre tombait à 17. Alors qu’il était remonté à 66 plaintes en 2019, seules 5 et 7 plaintes ont été redirigées vers l’ARCOM respectivement en 2020 et en 2021. 

Par ailleurs, appliquant depuis 2018 la décision du Collège d’autorisation et de contrôle du CSA (« CAC ») de ne plus transmettre les plaintes concernant RTL Belgium à son homologue luxembourgeois (l’ALIA), le SI examine désormais toutes les plaintes visant par exemple RTL-TVI, Club RTL ou RTL Play. En 2017, 27 plaintes avaient été transmises à l’ALIA. Depuis 2018, le SI examine donc les plaintes visant RTL Belgium, à savoir 68 plaintes en 2018, 74 en 2019, 27 en 2020 et 23 en 2021. 

La recevabilité des dossiers reprenant des « plaintes multiples » accentue également la modification des proportions.  

Au final, l’on peut se réjouir de l’hypothèse qu’une visibilité renforcée du CSA a permis aux citoyen.ne.s de mieux cerner les limites de sa compétence territoriale, renforcée par la mise en ligne de son site internet revu, sur lequel le formulaire de plaintes permet d’ailleurs de mieux cerner leur recevabilité, notamment territoriale. Le SI ne peut qu’apprécier cette évolution.  

Les thématiques qui mobilisent les publics 

Les plaintes sont souvent le reflet des préoccupations des publics, mais aussi de l’actualité médiatique et, partant, de l’actualité du CSA. 

En 2021, la thématique qui représente la plus forte proportion de l’ensemble des plaintes (recevables et irrecevables) est la protection des mineur.e.s. En effet, 25 plaintes parmi les 128 reçues concernent cette thématique, ce qui équivaut à presque un cinquième des plaintes (19,5 %). De manière presque aussi importante, la déontologie de l’information est le deuxième grief le plus formulé par les plaignant.e.s, c’est le cas de 23 des 128 plaintes, soit 18 %. Ensuite, on retrouve la discrimination, troisième grief le plus formulé par les plaignant.e.s, c’est le cas de 21 des 128 plaintes, soit 16,4 %. Plusieurs formes de discriminations sont visées : le racisme, le sexisme, l’homophobie, la transphobie, mais aussi l’on voit apparaître la discrimination entre les personnes vaccinées et non vaccinées. 

Si l’on ne prend en compte que les plaintes recevables, cette thématique est la deuxième la plus invoquée, après la protection des mineur.e.s.  

Par-là, on constate que nos concitoyen.ne.s placent ces questions au cœur de leurs préoccupations, ce qui est un motif de réjouissance en termes de démocratie et de diversité. Toutefois, force est de constater que la plupart de ces plaintes n’aboutissent pas à une sanction, car lors de leur analyse, le SI doit opérer la balance des intérêts entre ces droits et la liberté d’expression, à laquelle il ne peut être dérogé qu’à des conditions strictes. 

Ainsi, sur les 25 plaintes relatives à la protection des mineur.e.s, dont 19 étaient recevables, 13 ont été classées sans suite (6 ont fait l’objet d’une ouverture d’instruction – 4 dossiers) et sur les 21 plaintes portant sur des discriminations, dont 17 étaient recevables, 12 ont été classées sans suite (5 ont fait l’objet d’une ouverture d’instruction – 2 dossiers). 

La déontologie de l’information est le deuxième grief le plus invoqué par les plaignant.e.s, si l’on prend en compte les plaintes recevables et irrecevables. L’année 2021 a forcément été, comme l’année 2020, marquée par la crise sanitaire provoquée par la pandémie due au Covid 19 (plaintes pour fake news, désinformation). Il n’est donc pas étonnant que les plaintes aient reflété cette actualité. Puisque les 23 plaintes portaient sur des programmes d’information et touchaient uniquement à la déontologie journalistique, elles ont été transférées au Conseil de Déontologie journalistique (« CDJ »).  

La télévision, (encore et toujours) le premier média visé par les plaintes  

La télévision, visée par 66 % des plaintes, reste le premier média concerné par l’activité du SI (53 % en 2020). La radio représente 17 % des plaintes (26 % en 2020) et les contenus en ligne représentent 14 % des plaintes (15 % en 2020). 

Le traitement des plaintes 

Les plaintes traitées au sein du SI sont d’abord examinées sous l’angle de la recevabilité (voir supra). Le SI procède ensuite à une analyse sur le fond afin de vérifier s’il perçoit, ou non, des indices d’infraction à la législation audiovisuelle. Si, à l’issue de cet examen, le SI estime que le programme n’est pas susceptible de porter atteinte à la législation, car ce qui est dénoncé est sans objet, sans fondement ou sans preuve suffisante, la plainte est « classée sans suite ».  

S’il estime nécessaire d’instruire et, par exemple, d’interroger l’éditeur concerné, le SI ouvre un dossier d’instruction.  

Enfin, si au terme de son instruction, il considère que les faits dénoncés constituent potentiellement une infraction, le SI dépose un dossier d’instruction auprès du Collège d’autorisation et de contrôle (« CAC »), l’organe décisionnel du CSA. Celui-ci peut décider de notifier, ou non, un grief à l’éditeur, au distributeur ou à l’opérateur concerné. En cas de notification de grief, l’éditeur, le distributeur ou l’opérateur mis en cause est toujours auditionné. Suite à cette audition, le Collège rend sa décision finale dans laquelle il considère le grief établi ou non. S’il le considère établi, le Collège peut assortir sa décision d’une sanction.  

* Les plaintes portant sur le même sujet donnent lieu à l’ouverture d’un seul dossier. Les 12 dossiers d’instruction rassemblent 17 plaintes. Concernant les 60 plaintes classées sans suite, celles-ci relèvent de 47 dossiers. Concernant les 52 plaintes irrecevables, celles-ci relèvent de 51 dossiers. 

Les collaborations  

Lorsqu’il examine un dossier sur le fond, le SI peut faire appel à des instances extérieures. Les collaborations avec UNIA et l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes (« IEFH ») font l’objet de protocoles et permettent au SI de baser son dossier sur des expertises spécifiques précieuses. 

Le SI collabore également avec les instances d’autorégulation, telles que le Jury d’éthique publicitaire (« JEP ») et le CDJ.  

En 2021, 28 plaintes irrecevables ont été transmises au CDJ (36 en 2020). 14 autres plaintes, recevables, ont fait l’objet d’un transfert au CDJ, soit après avoir été classées sans suite par le SI, soit dans le cadre de dossiers d’instruction. Nous y reviendrons ci-après. 

Ces 28 plaintes irrecevables portent par exemple sur la désinformation (les « fake news »), la censure, le manque d’impartialité ou de déontologie, le respect du droit à la vie privée, ou encore le traitement de l’information. A cet égard, la crise du coronavirus a suscité un certain nombre de plaintes concernant l’opposition entre les personnes vaccinées et non vaccinées dans la manière de traiter l’information. 

Dans certains dossiers, le CSA et le CDJ sont tous les deux compétents. Pour ces cas, une procédure « dite conjointe » est prévue par le législateur, dans laquelle le CDJ rend un avis au CSA, fondé sur l’analyse du  respect de la déontologie journalistique. Le CSA se prononce ensuite sur la base de la législation audiovisuelle. Une instruction ouverte en 2021 a fait l’objet d’une procédure dite conjointe. Elle concernait des propos tenus par Jacques Borlée dans l’émission « Les visiteurs du soir » diffusée sur LN24.  

Ces procédures pouvant s’avérer particulièrement longues, compte tenu des étapes à respecter de part et d’autre, une procédure simplifiée a été mise en place. Celle-ci permet de réduire les délais de traitement et d’éviter l’ouverture de dossiers d’instruction essentiellement formels. 10 plaintes ont ainsi été classés sans suite par le CSA et transférées ensuite au CDJ pour analyse sous l’angle de la déontologie journalistique. 

Une auto-saisine 

Dans le courant de l’année 2020, les équipes du CSA avaient opéré un monitoring à grande échelle sur les services sonores et télévisuels pour observer les pratiques des éditeurs en matière de communication commerciale. Ce monitoring avait abouti sur cinq auto-saisines de la part du SI. Tous les dossiers n’étaient toutefois pas encore clôturés lors de la rédaction du rapport annuel de 2020. Désormais, ils le sont. Un de ces dossiers concernait Canal Zoom et a été classé sans suite après instruction. Un autre concernait le service Antipode et a fait l’objet d’une décision par le Collège. Le grief a été considéré établi (parrainage d’un journal parlé) mais n’a pas été assorti de sanction. Le troisième dossier concernait la diffusion de communication commerciale non nettement distincte des autres programmes ou séquences de programmes sur le service RTL-TVi et a fait l’objet d’une sanction de 3.000 € infligée à l’éditeur. Dans le quatrième dossier, le Collège a condamné l’éditeur à une amende de 5.000 € pour diffusion du programme « Loïc, fou de cuisine » sans l’identifier comme comportant de la communication commerciale selon les modalités prévues par le décret coordonné sur les services de médias audiovisuels alors applicable. Enfin, le cinquième dossier concernait la diffusion de communication commerciale clandestine dans l’émission « Le Mag » sur le service Antipode. Le Collège a considéré le grief établi et a condamné l’éditeur à la diffusion d’un communiqué. 

En 2021, le SI a décidé de s’autosaisir en ouvrant d’initiative un dossier d’instruction concernant l’absence de déclaration de l’éditeur Eleven Sports pour ses services francophones « Eleven/Pro League 1, 2 et 3 » auprès du Collège d’autorisation et de contrôle du CSA. Le Collège a suivi les conclusions du rapport d’instruction, à savoir une notification de grief concernant le fait de ne pas avoir effectué de déclaration préalable auprès du CAC du CSA pour les services précités, en infraction au décret du 4 février 2021 relatif aux services de médias audiovisuels et aux services de partage de vidéos.  


Les instructions 

Sur les 12 dossiers d’instruction ouverts en 2021, 4 ont été classés sans suite après instruction par le SI. Ces derniers portaient sur l’accessibilité des journaux télévisés de la RTBF, le respect du titre d’autorisation délivré à l’ASBL Active diffusion pour son service radiophonique « M Radio », la protection des mineur.e.s dans le cadre de la diffusion de la série « Chernobyl » par la RTBF ainsi que la discrimination dans le cadre de propos discriminatoires tenus sur LN24.  

Un dossier n’a pas encore fait l’objet d’une décision finale du Collège et concerne la dignité humaine (diffusion d’une vidéo d’une enfant mineure sur les comptes/pages de Radio Contact sur les réseaux sociaux Instagram et Facebook).  

Par ailleurs, 7 dossiers ont été clôturés et ont fait l’objet d’une décision par le Collège : 1 a été présenté au Collège qui a décidé de ne pas notifier de grief aux distributeurs mis en cause ; 6 ont fait l’objet d’une décision de sanction la part du Collège et concernaient la communication commerciale, la protection des mineur.e.s (3 dossiers), l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité humaine et le défaut de déclaration (cf. autosaisine supra).  

Dossier relatif au non-respect de l’article 77, paragraphe 5 du décret SMA 

Plainte de Playright concernant les distributeurs Proximus, Telenet Group, Telenet SPRL, VOO, BRUTELE, et Orange relatifs aux droits d’auteurs et aux droits voisins. Des litiges étant pendants devant les cours et tribunaux, le CAC a décidé de ne pas notifier de grief aux distributeurs concernés.  

Dossier relatif à la communication commerciale dans l’émission « Je vends ma maison » 

Le SI a été saisi d’une plainte concernant l’émission « Je vends ma maison » diffusée sur Plug RTL. L’émission consiste, pour trois agents immobiliers, à accompagner des propriétaires souhaitant vendre leur maison et à les conseiller pour mettre leur bien en valeur. Les trois agents proviennent tous de la société « We Invest », qui est présentée comme « parrain » de l’émission aux côtés d’autres sociétés. L’éditeur mentionne également que le programme contient du placement de produit. Le SI a relevé que, tout au long des émissions, la société We Invest était largement mise en avant. Si le parrainage et le placement de produit sont autorisés, ils ne peuvent se faire que moyennant le respect de certaines conditions prévues dans la législation, qui ont notamment pour objectif de protéger l’indépendance éditoriale de l’éditeur et de permettre au public de faire la distinction entre ce qui relève du programme et ce qui relève de la communication commerciale. Le Collège a considéré que, dans le cas de l’émission « Je vends ma maison », c’est toute la conception du programme qui avait été imaginée pour mettre en avant l’agence immobilière We Invest, ses agents et les services qu’ils offrent. Dès lors, il a considéré que le grief relatif au non-respect des règles en matière de parrainage était établi, dès lors que le programme a indubitablement incité à l’achat de ces services. Le CAC a également considéré qu’en tant que coproducteur de l’émission, le parrain We Invest avait nécessairement influencé le contenu de l’émission, ce qui constitue une atteinte à l’indépendance éditoriale de l’éditeur. Par ailleurs, le CAC a estimé que l’émission enfreignait trois des quatre conditions qui encadrent le placement de produit. Par conséquent, le Collège a décidé d’infliger à l’éditeur une amende de 8.000 €. 

Dossier relatif à la protection des mineur.e.s – horaire de diffusion de la série « You’re the worst » 

Le SI a été saisi de trois plaintes à propos de la diffusion de la série « You’re the worst » à une plage horaire inadaptée pour un jeune public et avec une signalétique inadéquate. Cette série était classifiée en catégorie 2 (comprenant les programmes déconseillés aux mineur.e.s de moins de 10 ans) et a été diffusée un samedi à 9H45, moins de quinze minutes après la fin du dessin animé « Pokemon » et juste après la fin de « Yapaka, une vie de chien ». L’éditeur n’a pas respecté la zone « tampon » rendue obligatoire par l’article 3, § 5 de l’arrêté relatif à la protection des mineur.e.s pour éviter que des mineur.e.s, encore devant leur écran à la suite directe d’un programme leur étant destiné, ne se retrouvent brusquement exposé.e.s à un programme susceptible de leur nuire. Au surplus, il faut noter que l’infraction est d’autant plus grave que non seulement l’épisode litigieux était susceptible de nuire aux mineur.e.s de moins de dix ans, mais qu’en outre, il commençait directement par une scène d’acte sexuel, avant même que ne commence son générique. L’exposition des mineur.e.s resté.e.s devant Club RTL après avoir regardé « Yapaka : une vie de chien » était donc particulièrement brusque et potentiellement choquante pour eux et elles. En outre, l’éditeur avait déjà été condamné en 2018 pour des faits très similaires. 

Dossier relatif à la protection des mineurs – signalétique « Doc Shot – Capitole, le coup de Trump » 

Le SI a été saisi d’une plainte concernant la diffusion, sur La Une, d’un spot d’autopromotion pour le programme « Doc Shot – Capitole, le coup de Trump », ayant pour sujet les débordements des partisans de Donald Trump au Capitole. 

Cette bande-annonce comportait deux séquences problématiques. La première montrait des images de l’assaut du Capitole, et notamment l’image d’un policier qui tire à travers une porte vitrée sur une femme qui tombe à terre. La seconde séquence montrait une manifestation à Charlottesville lors de laquelle on voit une voiture reculer brusquement dans une foule, touchant des manifestant.e.s. Il y a plusieurs personnes au sol, et des cris. In fine, l’éditeur a été sanctionné, d’une part pour avoir omis d’appliquer la signalétique adéquate (« -10 ») au programme-même, « Doc Shot – Capitole, le coup de Trump » et d’autre part pour avoir omis d’appliquer cette signalétique à sa bande-annonce.  

Dossier relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes (« C’est vous qui le dites ») 

En mars 2021, le SI a été saisi d’une plainte contre l’émission « C’est vous qui le dites » au cours de laquelle un débat portait sur la question de l’obligation ou non d’entretenir des rapports sexuels dans le cadre du mariage. La loi belge n’énonce nulle part qu’un époux ou une épouse ne soit soumis à une telle obligation, et elle condamne en revanche clairement toute relation sexuelle non consentie (viol). Pourtant, l’émission présentait la situation d’une manière beaucoup plus brouillée. En effet, l’animateur parle régulièrement d’obligation prétendument légale d’entretenir des rapports sexuels « consentis ». Le débat se concentre rapidement sur les questions du consentement et de l’obligation. Il fait entrer en jeu le « devoir conjugal », chaque débatteur exposant son interprétation de cette notion qui n’est pas légale et comporte, voire constitue, en soi un stéréotype sexiste, justifiant et banalisant la violence faite aux femmes. Sans être recadrés, l’un des journalistes invités et le dernier auditeur s’approprieront pleinement ce stéréotype en répétant que le mariage implique nécessairement des rapports sexuels. Alors que l’auditrice, seule femme invitée durant l’émission, s’offusque à plusieurs reprises et questionne même la légitimité de débattre d’un tel sujet, l’animateur lui répète régulièrement, à tort, qu’une « obligation » d’entretenir des relations sexuelles « consenties » est prévue dans la loi et qu’il est donc pleinement légitime d’en débattre. A côté de la présentation très équivoque, pour ne pas dire erronée, qui est faite du sens de la loi belge, l’éditeur s’est lancé sur un terrain délicat en proposant un débat pouvant facilement être interprété comme une question sur la possibilité de contraindre ou non son époux ou épouse à des relations sexuelles. Face à une telle question, l’obligation de l’éditeur de la traiter avec précaution et finesse n’est pas qu’une obligation de moyen et il ne peut se retrancher derrière le caractère « populaire » de l’émission ou derrière son faible temps de préparation. Selon le CSA, la RTBF, en l’espèce, n’a pas joué à suffisance son rôle dans la lutte contre les violences faites aux femmes, alors que les médias ont une réelle influence en la matière et qu’un acteur de service public se doit d’y être tout particulièrement attentif. Par sa désinvolture dans le traitement du sujet, elle a apporté son concours, même malgré elle, à la perpétuation d’un rapport de domination structurel entre hommes et femmes et d’une culture consistant à banaliser les violences faites aux femmes. Elle n’a, dès lors, pas respecté l’égalité entre les genres. En conséquence, le Collège a imposé à la RTBF la diffusion d’un communiqué.  

Dossier relatif à la protection des mineur.e.s dans l’émission « Le 16-20 » 

Le SI a été saisi d’une plainte relative à l’émission « Le 16-20 » diffusée sur Radio Contact, en particulier pour le jeu de questions/réponses « 220 € ou 220 volts » proposé par l’animateur David Antoine, au cours duquel, si l’auditeur donne une bonne réponse, un membre de l’équipe reçoit une décharge électrique et l’auditeur gagne de l’argent. Le plaignant pointait la dangerosité d’une telle expérience et estimait que la séquence constituait une atteinte à la dignité humaine. Ne retenant pas ce dernier point, le SI a examiné le programme sous l’angle de la protection des mineur.e.s. Le CAC a décidé de notifier un grief, notamment en raison de la valeur d’exemplarité (négative) à l’égard des mineur.e.s, du choix de l’heure de diffusion et de l’absence d’avertissement sur la dangerosité ou le caractère factice.  


Conclusion
 

L’année 2021 se place dans la continuation de 2020. Parmi les décisions prises par le Collège, ce sont les mêmes thèmes qui reviennent : la protection des mineur.e.s, l’égalité entre les femmes et les hommes et la communication commerciale. 

Ce que l’on retiendra des décisions relatives à la protection des mineur.e.s, c’est la constante vigilance que l’on doit garder, sous divers aspects. Ainsi, montrer des images violentes, même largement diffusées par ailleurs ou en d’autres temps, reste à chaque fois un nécessaire questionnement de la balance entre la liberté d’expression, le droit d’informer et la banalisation de la violence. De même, il est important de garder des zones de confiance pour les parents, lorsqu’il y a un environnement consacré aux enfants, une tranche horaire qui leur est dédiée : des zones tampons doivent exister, pour laisser le temps de sortir d’un univers protégé. Le dernier angle de protection est celui de l’exemplarité des médias ; ces derniers ne doivent pas oublier leur pouvoir d’influence ; cette question risque d’être dans le futur encore plus patente, les animateurs vedettes étant concurrencés par des influenceurs, souvent fort jeunes, avec un pouvoir potentiel mais accru d’attraction.  

La décision se rapportant à l’égalité entre les femmes et les hommes, quant à elle, est remarquable. En effet, la notion d’égalité reçoit une acception élargie, elle rappelle le pouvoir des médias et, partant, leur responsabilité, dans la lutte contre les violences faites aux femmes, ce que la décision de 2020 avait déjà mis en exergue (dans le cadre du programme « Au commissariat »). Elle insiste sur l’importance de ne pas perpétuer des stéréotypes ; en l’occurrence, celui de l’existence d’un supposé devoir conjugal, impliquant que les relations sexuelles sont obligatoires. Or, il existe un lien entre les violences faites aux femmes et le traitement médiatique des violences conjugales. Ainsi, la décision rappelle encore la nécessité pour les médias de prendre conscience du rôle qu’ils ont à jouer dans la lutte contre les inégalités entre les hommes et les femmes, et notamment dans le phénomène de la violence envers les femmes. Par cette décision, le CSA confirme son engagement en tant que régulateur dans la lutte qui doit être collective contre les violences faites aux femmes. 

Ainsi, même si 2021 a connu une baisse du nombre de plaintes, il n’en reste pas moins que le CSA montre son implication toujours aussi constante dans la protection des mineur.e.s et l’action volontaire pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Il s’agit de prendre sa part de responsabilité collective, telle que posée par la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite « Convention d’Istanbul ». 

En termes de perspectives, le décret relatif aux services de médias audiovisuels et aux services de partage de vidéos, entré en vigueur en avril 2021 devrait se déployer, principalement en ce qui concerne les questions de discrimination. Par ailleurs, on peut s’attendre à ce que le CSA soit sollicité pour des SMA moins classiques.