Depuis 1989, la matière de la radiodiffusion (aujourd’hui des services de médias audiovisuels ou « SMA ») est harmonisée au niveau européen par le biais de directives. Les décrets de la FWB dans cette matière sont, en grande partie, le fruit d’une transposition de ces directives européennes.  

 

En 2018, la directive dite « SMA » a fait l’objet d’une révision substantielle, notamment pour inclure dans son champ d’application une nouvelle catégorie de services : les services de partage de vidéos. La même année a également été adoptée une directive établissant un Code des communications électroniques européen (CCEE), qui abroge et remplace trois anciennes directives. 

 

En transposant ces nouvelles directives, le législateur de la FWB a fait le choix de ne pas modifier à nouveau le « décret SMA » de 2003 mais d’adopter un tout nouveau décret. Il s’agit du décret du 4 février 2021 (entré en vigueur le 15 avril 2021) relatif aux services de médias audiovisuels et aux services de partage de vidéos, qui reprend bon nombre des dispositions de l’ancien décret, mais également des dispositions nouvelles, et qui s’articule selon une structure revue en profondeur.  

 

Le présent article a pour objet de synthétiser les nouveautés les plus marquantes apportées par le nouveau décret. 

 

  • Champ d’application matériel du décret 

 

Le nouveau décret étend son champ d’application à deux nouvelles catégories de régulés : les fournisseurs de services de communications électroniques, et surtout, les fournisseurs de services de partage de vidéos (SPV). 

   

La grande différence entre fournisseurs de SPV et éditeurs de SMA réside dans le fait que le fournisseur de SPV n’exerce pas de responsabilité éditoriale sur son service. Tout au plus en détermine-t-il l’organisation, à l’aide, notamment, de moyens automatiques ou d’algorithmes.  

 

Ces acteurs entrent donc désormais dans le champ de la régulation, ce qui permet de rendre plus équitable un marché dans lequel, jusqu’alors, seuls les éditeurs de SMA étaient soumis à la régulation. Il faut cependant noter que les fournisseurs de SPV ne sont pas soumis aux mêmes règles que les éditeurs de SMA, mais à des règles créées spécialement pour eux dans un nombre limité de matières (contenus illicites, protection des mineurs et communication commerciale).   

 

  • Champ d’application territorial du décret 

 

S’agissant des éditeurs de SMA, le nouveau décret vient éclaircir certains points qui faisaient controverse dans l’ancien décret. Il est désormais explicitement précisé que :  

  • La compétence territoriale s’apprécie non pas par éditeur, mais service par service ; 
  • Pour apprécier le critère de rattachement territorial lié à la « partie importante des effectifs », il faut tenir compte des effectifs « employés aux activités liées aux programmes du service de médias audiovisuels », ce qui exclut le personnel lié à des tâches non éditoriales ; 
  • Pour apprécier le critère du « lieu où sont prises les décisions éditoriales », il ne faut tenir compte que des décisions prises régulièrement et qui sont liées au fonctionnement d’un SMA au quotidien 

 

  • Pluralisme 

 

En matière de pluralisme, le nouveau décret marque le retour à l’exigence d’un pluralisme structurel, c’est-à-dire un pluralisme d’éditeurs et pas seulement de services.  

 

  • Contenus illicites 

 

Le nouveau décret renforce la protection du public contre les différents types de contenus illicites : 

  • En ce qui concerne l’égalité hommes-femmes, la notion de discrimination fondée sur le sexe est désormais précisée ; 
  • En ce qui concerne l’égalité en général, ce n’est plus seulement l’incitation à la discrimination qui est prohibée mais également le simple fait, pour un programme, de comporter des discriminations ; 
  • En ce qui concerne les autres contenus illicites, leur liste est étendue pour viser notamment les contenus liés au terrorisme, au racisme/à la xénophobie, ou à la pédopornographie. 

 

  • Protection des mineurs 

 

Le nouveau décret n’interdit plus la diffusion de programmes susceptibles de nuire « gravement » à l’épanouissement des mineurs, mais il les soumet à des mesures de contrôle d’accès particulièrement strictes.  

 

Par ailleurs, il instaure une signalétique descriptive. Cela signifie qu’elle ne peut plus se contenter d’indiquer qu’un programme est potentiellement préjudiciable pour certaines catégories de mineur.e.s, mais qu’elle doit indiquer pour quelle raison il l’est (violence, sexe, drogue, langage, etc.). La mise en place de cette nouvelle signalétique doit faire l’objet d’un arrêté d’exécution. 

 

  • Médias de proximité 

 

Le nouveau décret change la dénomination des anciens éditeurs de télévision locale en « médias de proximité ». 

 

Il précise également que les conventions conclues entre ces médias et le Gouvernement peuvent les habiliter à créer non plus uniquement des services télévisuels, mais des SMA, ce qui ouvre la porte à l’édition, par les médias de proximité, de services radiophoniques.  

 

  • Quotas 

 

En télévision, l’obligation de mise en valeur des œuvres européennes est complétée par un quota qui impose aux éditeurs de diffuser au moins 30 % d’œuvres européennes, dont un tiers d’œuvres d’initiative belge francophone. Ce quota est, en outre, évolutif. Des exceptions sont toutefois prévues pour certains types de services. 

 

En radio, le quota d’œuvres musicales émanant de la FWB est également renforcé et passe de 4,5 à 6 %. Il s’agit également d’un quota évolutif. 

 

  • Communication commerciale 

 

Diverses nouveautés sont amenées par le nouveau décret en matière de communication commerciale : 

  • Elle ne peut plus encourager un usage excessif de produits relevant de la « malbouffe » ; 
  • Le concept de publicité ciblée est défini et régulé ; 
  • Le Collège d’avis du CSA se voit confier la compétence d’adopter des codes de conduite reprenant les meilleures pratiques en matière de « malbouffe », ainsi qu’en matière d’insertion et de durée des spots publicitaires sur les services non linéaires. 

 

  • Contribution à la production 

 

Deux nouveautés significatives sont apportées par le nouveau décret : 

  • L’éditeur ou le distributeur qui ne donnerait pas aux autorités les moyens de calculer le montant de sa contribution pourra être soumis à une contribution forfaitaire de trois millions d’euros. 
  • L’obligation de contribuer est désormais étendue aux éditeurs de services extérieurs qui ciblent le public de la FWB, au prorata des recettes brutes provenant de ce marché. Cette nouveauté découle directement de la directive SMA révisée, et l’obligation existera donc également de manière réciproque pour les éditeurs de la FWB qui cibleraient d’autres Etats membres. 

 

  • Patrimoine audiovisuel 

 

Le nouveau décret définit, pour la première fois, le « patrimoine audiovisuel » de la FWB, et marque une volonté d’en assurer la protection. Un opérateur chargé de pérenniser ce patrimoine devra être désigné par le Gouvernement.  

 

  • Must carry 

 

Un positionnement préférentiel est désormais garanti pour TV5 Monde parmi les quinze premières positions de l’offre de base de chaque distributeur. 

 

  • Analyses de marchés 

 

La procédure d’analyse des marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques se voit apporter plusieurs modifications substantielles liées à la transposition du CCEE. Ces modifications ont trait notamment aux procédures d’engagement, à l’imposition de mesures correctrices à des entreprises uniquement de gros et à l’organisation de consultations publiques, ouvertes notamment aux utilisateurs et aux consommateurs. En outre, le CSA peut désormais assortir d’astreintes les sanctions administratives qu’il prononce. 

 

  • Radios 

 

Certaines modalités des procédures d’autorisation sont modifiées : 

  • Pour l’octroi de fréquences provisoires par le CSA, la durée maximum des autorisations passe de neuf à trois mois. 
  • En ce qui concerne l’autorisation des opérateurs de multiplex numériques, il est prévu que le CSA puisse désigner un opérateur choisi non plus à l’unanimité mais par au moins 80 % des éditeurs autorisés sur ce multiplex.  

 

  • Organisation du CSA 

 

Enfin, le nouveau décret modifie également diverses règles de fonctionnement du CSA. L’on peut notamment mentionner : 

  • Une nouvelle mission de participer à une analyse périodique, avec des recommandations, sur le traitement médiatique des violences faites aux femmes ; 
  • Davantage de transparence sur l’utilisation par le CSA de ses ressources humaines et financières ; 
  • Une nouvelle procédure de désignation pour les membres du CAC, impliquant un appel à candidatures et une comparaison des titres et mérites des candidat.e.s ; 
  • Une affirmation plus explicite de l’indépendance du Secrétariat d’instruction ; 
  • La possibilité de prononcer des astreintes. 

 

Pour plus d’informations sur le nouveau décret : Mieux comprendre le nouveau décret relatif aux services de médias audiovisuels et aux services de partage de vidéos – CSA Belgique 

 

 

 

 

Consultez également le dossier consacré au nouveau décret dans notre webzine : 

https://regulation.be/category/nouveau-decret/ 

 

 

 

Un nouveau décret audiovisuel pour répondre aux enjeux européens 

https://regulation.be/2021/11/17/un-nouveau-decret-audiovisuel-pour-repondre-aux-enjeux-europeens/ 

 

Le nouveau décret en bref 

https://regulation.be/2021/11/17/le-nouveau-decret-en-bref/ 

 

 

 

Une plus grande visibilité des artistes locaux dans nos radios 

https://regulation.be/2021/11/17/une-plus-grande-visibilite-des-artistes-locaux-dans-nos-radios/ 

 

 

 

Discriminations : l’arsenal juridique audiovisuel se renforce 

https://regulation.be/2021/11/17/discriminations-larsenal-juridique-audiovisuel-se-renforce/ 

 

 

Discriminations : “Sans arsenal juridique, nous serions des tigres sans dents 

https://regulation.be/2021/11/17/discrimination-sans-arsenal-juridique-nous-serions-des-tigres-sans-dents/ 

 

Les géants au diapason de la régulation 

https://regulation.be/2021/11/17/les-geants-au-diapason-de-la-regulation/ 

 

 

Une égalité de traitement sur un même marché 

https://regulation.be/2021/11/17/lextension-du-systeme-de-contribution-a-la-production-une-egalite-de-traitement-sur-un-meme-marche/ 

 

Le pluralisme, l’essence même de notre rôle de régulateur 

https://regulation.be/2021/11/17/le-pluralisme-lessence-meme-de-notre-role-de-regulateur/ 

 

 

« C’est une gigantesque boîte de Pandore qui s’est ouverte » 

https://regulation.be/2021/11/17/%e2%80%afcest-une-gigantesque-boite-de-pandore-qui-sest-ouverte%e2%80%af/ 

 

 

Bientôt une nouvelle signalétique pour mieux protéger les jeunes publics 

https://regulation.be/2021/11/17/bientot-une-nouvelle-signaletique-pour-mieux-proteger-les-jeunes-publics/ 

 

 

Un système de contribution à la production locale qui pourrait être plus ambitieux 

https://regulation.be/2021/11/17/un-systeme-de-contribution-a-la-production-locale-qui-pourrait-etre-plus-ambitieux/