Le Collège d’avis du CSA commente l’avant-projet de décret soumis par la Ministre

La Ministre des Médias a sollicité l’avis du Collège d’avis sur une série de propositions de modifications du décret relatif aux services de médias audiovisuel et aux services de partage de vidéos. Celles-ci portent d’une part sur des corrections et clarifications de certains articles et d’autre part sur des propositions plus conséquentes, notamment pour la création en FM et en DAB+ de radios provisoires et pour le système de contribution à la production des éditeurs télévisuels et des distributeurs.

Le Collège d’avis du CSA, qui s’est réuni à trois reprises pour examiner ces propositions et s’est entouré d’expert.e.s invité.e.s directement concerné.e.s par ces modifications, a adopté un avis qui commente chacune de ces modifications.

Régime de contribution à la production des distributeurs et des éditeurs de services

L’avant-projet de décret qui modifie les taux de contribution à la production des éditeurs mais également des distributeurs a été largement discuté au sein du Collège d’avis. Certains membres, le saluant, d’autres pointant le fait qu’il s’agit d’une des augmentations les plus importantes , d’autres enfin s’interrogeant sur leur proportionnalité, voire sur les raisons invoquées pour y intégrer les distributeurs.

En effet, Le secteur de la distribution voit également ses contributions augmenter. Son montant résulte d’un choix discrétionnaire entre un montant forfaitaire par abonné ou un pourcentage de leur chiffre d’affaires. Alors que la contribution était fixée à 2€ par utilisateur ou 2,5% des recettes du précédent exercice, elle passerait en 2024 à un montant forfaitaire de 3,4€ par utilisateur ou de 3,125% du chiffre d’affaires et de 4,08€ par utilisateur ou de 3,75% du chiffre d’affaires à partir de 2025. Ce qui représente un gain estimé entre 2 et 3 millions d’euros sur base de projections.

Le texte prévoit, en ce qui concerne les éditeurs locaux et ceux qui génèrent un chiffre d’affaires sur le marché de la Fédération Wallonie Bruxelles, que le taux de contribution maximum passe de 2,2% à 9,5% maximum pour les chiffres d’affaires les plus élevés. Afin de faciliter l’absorption de ces nouveaux investissements, l’implémentation de ces nouveaux taux serait progressive pour arriver aux taux finaux dans 4 ans, soit en 2027.

Une estimation sur base des projections réalisées par les services du CSA établit un gain supplémentaire annuel d’un peu plus de 8 millions d’euros destiné à la production par les éditeurs à partir de 2027. Ces contributions pourront désormais également porter sur certains programmes de flux,  c’est à dire des programmes destinés à être diffusés une seule fois puisqu’ensuite ils perdent leur valeur première, alors qu’ils ne portaient auparavant que sur les programmes de stock, ceux qui peuvent être diffusés à plusieurs reprises sans perdre de la valeur tels par exemple les documentaires ou les fictions.

Le mécanisme de fléchage des investissements des distributeurs et des éditeurs est également modifié par la nouvelle proposition de décret.

Au moins 35% devraient être investis dans la coproduction ou le préachat d’œuvres audiovisuelles d’initiative belge francophone, un maximum de 30% dans la commande de programmes, dont au minimum 20% en dépenses d’écriture et de développement, un maximum de 5% dans la formation professionnelle ou dans l’accessibilité des œuvres audiovisuelles.

Les investissements pourraient également porter sur l’écriture de scénarii et le développement d’œuvres audiovisuelles dont le scénariste est sous contrat de droit belge, mais pas sur des participations en coproduction ou en préachat effectuées en application d’une autre obligation légale, ou bénéficiant d’un quelconque avantage légal (par exemple le tax shelter).

 

Radios éphémères en FM et DAB+

En ce qui concerne les modifications relatives aux services sonores, le projet de décret introduit un mécanisme qui donne la possibilité de créer une radio éphémère en DAB+ similaire à celui qui existe déjà en FM. A cette fin, la législation prévoit de réserver sur les différents multiplex des capacités pour la mise en œuvre de ces services. L’utilisation de ces fréquences serait par ailleurs soumise à des conditions tels le respect de quotas musicaux ou la sélection par le CSA d’un projet au détriment d’un autre si plusieurs demandes étaient introduites sur le même multiplex aux mêmes dates.

En FM, le système d’attribution de fréquences provisoires se voit également modifié puisque les autorisations seraient désormais strictement réservées aux personnes morales et limitées à 30 jours contre 3 mois auparavant.

En DAB+ tout comme en FM, le CSA pourrait rejeter les demandes si celles-ci visent des zones de couverture sans pertinence avec le projet introduit.

Les membres du Collège d’avis représentant les radios en réseau s’accordent pour refuser que les multiplex communautaires (ceux qui couvrent l’ensemble de la Fédération Wallonie-Bruxelles) et provinciaux (ceux destinés à des couvertures provinciales) réservent des capacités pour ce type de projet. Ils invitent par ailleurs le Gouvernement à mettre en appel d’offres la dernière place disponible afin de compléter l’offre numérique et  permettre une meilleure répartition des coûts d’exploitation, ceux-ci étant partagés entre les différentes radios autorisées sur ce même multiplex.

Désignation de membres de la Commission consultative de la création radiophonique

L’avant-projet de décret prévoit d’abroger la limite fixée pour le renouvellement des membres de la Commission consultative de la création radiophonique. Ses membres ont actuellement un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois. Cette suppression de limite viserait à faire face à la difficulté d’obtenir suffisamment de candidatures pour composer la Commission et assurer son bon fonctionnement.

Aucun membre du Collège d’avis ne défend cette abrogation. Selon un de ses membres, celle-ci risque d’accentuer l’entre-soi déjà perçu actuellement. D’autres possibilités sont évoquées pour pallier les difficultés évoquées par le Cabinet, dont une meilleure communication de la part de l’administration ou un mécanisme de dérogation si malgré plusieurs appels, aucune nouvelle candidature n’est reçue. Les membres du Collège affirment néanmoins l’importance du fonctionnement de cette Commission au regard du contexte global où l’audio connait un regain d’intérêt chez les plus jeunes, notamment pour les podcasts.

En conclusion, l’avis précise que plusieurs intervenant.es saluent le processus de concertation qui permet au plus grand nombre d’échanger sur ces questions.

De nombreux acteurs du secteur saluent également le nouveau mécanisme de contribution à la production, notamment son ouverture aux programmes de flux, le fléchage et l’augmentation des taux pour les distributeurs du côté des représentant.es des auteurs.autrices et des producteur.trice.s indépendant.e.s.

Le Cabinet et le CSA insistent sur les opportunités que représentent les modifications du mécanisme, précisant que l’objectif est bien de développer le secteur dans une optique de gain mutuel, tant pour les éditeurs et les distributeurs, que pour le secteur de la production et de la création.

Les contributions des différents membres sont également jointes à l’avis pour détailler les positions de chacun des acteurs consultés dans le cadre de ces modifications.

>> Consulter l’avis et les différentes contributions

Les modifications proposées des taux de contribution des éditeurs

 

Décret actuel:

 

Avant-projet de décret: