L’ERGA adopte 15 recommandations à destination de la Commission européenne pour rencontrer les nombreuses difficultés liées au rattachement des services de médias audiovisuels à la compétence et la régulation d’un Etat déterminé.
Depuis deux ans, les régulateurs européens de l’audiovisuel – dont le CSA – sont réunis par la Commission européenne au sein d’un « Groupe de régulateurs européens des services de médias audiovisuels» (ERGA) pour la conseiller, notamment sur l’évolution du cadre règlementaire européen (la directive « SMA » actuellement en révision).
Parmi ses chantiers prioritaires figure celui de la « compétence territoriale ». Ce fut pour l’ERGA l’occasion d’aborder la question de savoir comment soumettre à des règles équivalentes les acteurs opérant des activités destinées spécifiquement à un même territoire (level playing field).
Au plan européen, le bilan est double. D’un côté, les régulateurs constatent des différences de mise en œuvre de la directive SMA entre les États membres. De l’autre, le contexte change au gré des récentes évolutions du paysage audiovisuel, tels que l’émergence des services à la demande sur Internet (en particulier extra-européens), offrant leurs services au départ d’États membres plus accueillants et souvent moins contraignants que les marchés nationaux ciblés.
Dans le rapport que l’ERGA vient de publier, les régulateurs dressent d’abord leur évaluation de l’application de la directive SMA. Au plan des principes, sans remettre en cause le principe dit du pays d’origine, près de la moitié des autorités européennes estiment que le principe de liberté d’établissement a créé ou peut créer des situations d’inégalité de traitement entre entreprises en cas de ciblage de leur marché. Sur le plan économique, plusieurs régulateurs témoignent de conséquences négatives sur leur marché national, lorsque les services ciblant leur territoire ne contribuent pas de manière équivalente à la production de contenus audiovisuels ou développent des pratiques publicitaires interdites dans leur droit national1, à la différence des services qui y sont établis.
L’évaluation du dispositif actuel de la directive témoigne encore d’un nombre significatif de problèmes : manque de clarté des critères de rattachement à une juridiction, difficulté de déterminer la responsabilité éditoriale, caractère excessivement formel des procédures de dérogation à la liberté de circulation (infraction à la protection des mineurs ou d’interdiction d’incitation à la haine), ineffectivité de la procédure anti-contournement des règles nationales plus strictes.
A l’issue de ce rapport, l’ERGA a délivré 15 recommandations.
Parmi celles-ci, on notera la nécessité de revoir la directive sur plusieurs points et notamment :
- Clarifier les critères de rattachement à la compétence territoriale des Etats et veiller à une application plus harmonisée de concepts-clés tels que le « contrôle éditorial » – qui permet de déterminer par qui et où sont exercés effectivement le choix et la sélection des programmes -;
- Dans les situations d’Etats ciblés par des services télévisuels depuis d’autres Etats membres, améliorer la procédure de coopération formelle, clarifier et simplifier les procédures qui devraient déjouer les tentatives de contournement des règles du pays de destination.
- Appliquer ces dispositifs anti-contournements aux services non linéaires également.
D’autres recommandations portent sur des mesures non législatives, et en particulier la transparence des données entre Etats relatives à la détermination de la compétence territoriale et aux cadres règlementaires applicables ainsi qu’une meilleure coopération entre Etats et avec la Commission.
Le 25 mai dernier, la directive SMA a entamé son parcours de révision. Les recommandations de l’ERGA sur la compétence territoriale, adoptées par consensus, ont été conçues pour nourrir le débat européen par un rapport reposant sur l’expertise et l’indépendance des régulateurs qui en sont membres.
Voir la synthèse et les conclusions du rapport en français
Voir la synthèse et les conclusions du rapport en anglais
Voir le rapport complet en anglais