par Paul-Eric Mosseray, Directeur de la Coopération Internationale du CSA

 

Durant la dernière semaine d’aout (21 au 26 aout 2022) , une visite d’étude à Bruxelles était organisée au profit d’une délégation composée de jeunes journalistes tunisiens travaillant dans le domaine de la radio (secteurs public, privé et associatif), du Président de la HAICA et son Secrétaire général et d’un membre du Conseil.

A l’origine de ce projet, le programme de partenariat entre la HAICA et l’UNICEF visant la consolidation des compétences des journalistes radios à l’échelle nationale et régionale. Il s’est agi pour ces professionnels des médias tunisiens de découvrir différents aspects de l’expérience belge dans le domaine de la radio et de la régulation. Plus spécifiquement, cette mission d’information était concentrée sur les pratiques professionnelles en matière de contenu journalistique et les nouvelles tendances en Belgique dans ce domaine, tel que la traitement de l’information dans un média comme Tarmac, le média digital de la RTBF dédié aux nouvelles générations et à la culture urbaine

Pour ouvrir le programme, la délégation a choisi de rencontrer le président du CSA – Karim Ibourki – et l’équipe de l’Unité radio du CSA coordonnée par Xavier Jacques-Jourion. L’objectif était d’abord de comprendre le paysage radiophonique en Fédération Wallonie-Bruxelles, son architecture et la diversité de son offre. Dans un paysage abondant, comment arbitrer les multiples demandes, assure la diversité par l’attribution de formats pour chaque projet radiophonique et organiser la priorité de ceux-ci dans les différentes zones, urbaines ou rurales. Certaines radios indépendantes bénéficient du statut particulier de « radio associative et d’expression » qui leur permet d’accéder à un soutien financier pour les aider à déployer leurs missions d’information, d’éducation permanente, de participation citoyenne ou de développement culturel. Comment le CSA attribue-t-il ce statut ? A cette occasion, les intervenants tunisiens ont été particulièrement sensibles au rôle exercé par le CSA comme régulateur mais également comme promoteur d’un paysage diversifié et pluraliste, et à sa volonté d’accompagner le secteur

Partager différentes expériences concrètes

Rencontre d’abord au cœur de Bruxelles de Radio Panik et de son coordinateur de programmation Pierre de Jaeger. Créée en 1983 à l’initiative d’un groupe de personnes militant contre le racisme et pour les droits de l’homme, Radio Panik se définit comme une radio associative dont l’objectif est de contribuer à la promotion socioculturelle de la population dans la région bruxelloise. Elle a comme but l’émancipation réelle des individus dans le respect des différences culturelles et des procédures démocratiques.  Deux préoccupations au centre des discussion : Quelle relation ce média de proximité entretient-il avec ses publics, et notamment les jeunes publics ? et au cœur des crises qui s’enchainent, comment les radios à but non lucratif peuvent-elles faire face (crise sanitaire, crise énergétique, inflation galopante etc.) et encaisser l’impact qu’elles ont sur leurs moyens financiers.

Rendez-vous ensuite en Brabant wallon, pour découvrir la réalité d’une radio régionale , Radio Antipode, son fondateur Etienne Baffrey et son administratrice Maria Eva Jauregui. De radio locale sur le site universitaire de Louvain-la-neuve, Antipode décrochera par la suite la couverture de toute une province, lui assurant sa pérennité plus de 35 ans après sa naissance.  Les radios en region, financées par la publicité sont également une réalité tunisienne. C’est ici l’aspect singulier d’une couverture régionale de l’information, son rôle de tremplin de journalistes prometteurs pour les médias nationaux, la difficile concurrence des radios nationales en décrochage qui ont figuré au centre des discussions.

Cap sur la RTBF, avec un objectif précis : découvrir le projet Tarmac en rencontrant Thomas Duprel, le père du projet et Mehdi Khelfat, chef de rédaction et référent info « nouvelles générations». Pour la délégation tunisienne, c’est évidemment le défi lancé par la RTBF de créer un média digital native destiné surtout aux jeunes qui retient l’attention. D’abord parce que les nouvelles plateformes ont détourné toute une génération de la radio et la télévision et qu’il est indispensable que le média de service public aille à la rencontre de ces publics, là où ils sont. Et parce que les nouvelles expressions urbaines et les nouvelles interactions numériques sont le quotidien de cette génération. L’occasion aussi pour les journalistes d’échanger sur la manière dont la RTBF a fait face au phénomène de la désinformation pendant les deux dernières crises d’envergure,  Covid-19 et plus récemment la guerre en Ukraine.

Le Conseil de déontologie journalistique – CDJ – figurait également au programme, lors d’une rencontre avec Marc de Haan, président et Muriel Hanot, secrétaire générale. Au menu de la rencontre : comment sensibiliser les médias et les journalistes au respect des règles déontologiques dans un paysage où les exigences de l’information en continu peuvent donner lieu à de graves dérives ? quels rapports le CDJ entretient-il avec les médias et les journalistes, et quelles initiatives prend-t-il en matiere de formation, de sensibilisation ?

 

La poursuite de la coopération tuniso-belge

 

En clôture de cette visite d’étude, les membres de la délégation étaient reçus par le ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles Pierre-Yves Jeholet avec les représentants du CSA. Le ministre-président est également en charge des Relations internationales et de Wallonie-Bruxelles International  (WBI) qui assure depuis plusieurs années un soutien au renforcement de capacités du régulateur audiovisuel, la HAICA. Plus récemment, et à l’issue du projet de Jumelage de l’UE 2018-2021 entre le CSA et la HAICA, un nouveau programme de coopération entre les régulateurs a été scellé. Inscrit au sein de l’accord de coopération entre la Belgique (WB) et la Tunisie , il permet l’organisation d’ateliers de formation à Tunis et de visites d’études à Bruxelles dans les domaines de la diversité culturelle, l’égalité femmes-hommes, la représentation du jeune public ou encore la protection des consommateurs sur les nouvelles plateformes audiovisuelles.  Les participants convenaient de l’importance de poursuivre et de renforcer le rôle du régulateur tunisien, qui constitue un acteur de premier plan, pour la sauvegarde de l’indépendance et du pluralisme des médias, au sein de la démocratie tunisienne.

 

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