• Le Secrétariat d’instruction conclut que la potentielle atteinte portée à la dignité humaine ne peut être considérée comme étant grave et manifeste et ne peut donc être établie.

 

  • Il considère, à l’instar de l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes (IEFH), que la diffusion d’idées reçues concernant les violences sexuelles (tel qu’associant le viol au plaisir) participe à la banalisation du viol et en minimise le traumatisme.

 

  • Le SI est donc intervenu auprès de l’éditeur pour l’appeler à la plus grande vigilance dans le traitement médiatique des violences sexuelles.

 

 

Rappel des faits

 

Le Secrétariat d’instruction du CSA (« SI ») avait été saisi de 45 plaintes relatives au programme « C’est vous qui le dites » diffusé sur Vivacité le 12 janvier 2018. Ces plaintes visaient plus précisément l’un des sujets débattus ce jour-là dans l’émission, sujet annoncé comme suit : « On peut jouir lors d’un viol je vous signale ». Brigitte Lahaie l’a dit hier sur BFM TV. Vous lui répondez quoi ce matin ? 

 

Les plaignant.e.s avaient été interpellé.e.s notamment par le choix de la question et par les propos tenus en cours d’émission. Après écoute, le SI avait estimé que ce programme était susceptible de poser question au regard du respect de la dignité humaine et de l’égalité entre les femmes et les hommes (article 9,1° du décret coordonné sur les services de médias audiovisuels).

 

Certaines plaintes visant spécifiquement les propos d’une journaliste invitée dans l’émission, elles avaient été transmises pour avis au Conseil de déontologie journalistique (CDJ). Le CDJ a transmis son avis au CSA le 30 avril 2019. Dans ce dossier, le SI avait également sollicité un avis de l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes (IEFH).

 

 

 

Analyse et conclusions du Secrétariat d’instruction

 

Le SI estime que si le débat est mené avec légèreté, sans délicatesse ou émotion particulière, l’on ne peut pour autant constater d’intention ou d’effet de dégradation ou d’avilissement des victimes. Le SI conclut dès lors que la potentielle atteinte portée à la dignité humaine ne peut être considérée comme étant grave et manifeste, et ne peut donc être établie.

 

Il relève que dans la première partie de l’émission, les intervenants ne contextualisent pas correctement le sujet des violences sexuelles et participent à véhiculer une idée fausse sur ces violences, en relayant des propos associant le viol à la notion de plaisir.

 

Dans son avis, l’IEFH rappelle que l’idée selon laquelle une victime ayant eu un orgasme durant le viol aurait eu du plaisir fait partie des mythes au sujet des agressions sexuelles[i]. L’IEFH précise qu’il convient de faire la distinction entre le plaisir et les réactions mécaniques du corps, dès lors qu’un orgasme féminin « n’est pas nécessairement le résultat d’une excitation sexuelle mais peut survenir dans des situations de stress extrême ».

 

L’IEFH note également « un manque d’intervention des personnes présentes pour remettre en question l’affirmation litigieuse et la tournure des débats n’ayant pas fait l’objet d’une mise en perspective suffisante. »

 

Le SI considère, à l’instar de l’IEFH, que la diffusion d’idées reçues concernant les violences sexuelles participe à la banalisation du viol et en minimise le traumatisme. De tels propos sont ainsi susceptibles de porter atteinte à l’égalité entre les femmes et les hommes.

 

Le SI relève cependant que la présence de ces idées reçues est contrebalancée par plusieurs interventions dans le débat. Le SI prend en outre en considération les suites apportées à l’instruction. Il décide de classer le dossier.

 

Le Secrétariat d’instruction a toutefois décidé d’intervenir auprès de l’éditeur pour l’appeler à la plus grande vigilance au regard du traitement médiatique des violences sexuelles.

Les médias jouent en effet un rôle important dans la diffusion des normes sociales et peuvent conforter des représentations allant à l’encontre d’une égalité de fait.

 

Lire aussi le communiqué d’ouverture d’instruction