Ce jeudi 2 décembre, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a été élu à la présidence de l’ERGA (European Regulators Group for Audiovisual Media Services), le Groupe Européen des régulateurs de l’audiovisuel. Représenté par son Président Karim Ibourki, le CSA poursuivra le travail mené avec brio par son homologue allemand, Tobias Schmid du DLM, qui a occupé la présidence durant les deux dernières années. Deux dossiers majeurs sont actuellement sur la table à savoir le règlement sur les services numériques communément appelé DSA (Digital Services Act) et le nouveau EMFA (European Media Freedom Act). L’AGCOM, l’autorité de régulation italienne, occupera la vice-présidence de l’ERGA aux côtés de son homologue belge. Le CSA et l’AGCOM reprennent le flambeau dans un contexte où le rôle de la régulation des médias est crucial et touche à des enjeux majeurs comme la lutte contre la désinformation ou le maintien de la démocratie dans l’environnement du web. Des enjeux qui appellent à des engagements forts, comme le rappelle le Président de l’AGCOM Giacomo Lasorella. « J’exprime tout mon engagement et celui de l’AGCOM pour poursuivre les travaux de l’ERGA en contribuant au débat européen en cette période de défis sans précédent pour le secteur des médias« , a-t-il déclaré.
Depuis plusieurs années, l’ERGA occupe une place grandissante auprès de la Commission européenne. Ce groupe réunit les régulateurs nationaux des Etats membres et a pour principales missions de fournir une expertise technique à la Commission, notamment sur la mise en œuvre de la Directive SMA et les questions relatives aux services des médias audiovisuels, et de partager des bonnes pratiques et expériences dans l’application de cette Directive. L’ERGA produit des rapports, remet des avis et des recommandations ; il réalise également des monitorings et peut mener des enquêtes auprès des publics et des acteurs du marché. « Occuper la présidence d’un tel groupe représente un honneur mais aussi un défi important pour nos équipes » confie Karim Ibourki. En effet si le CSA n’est pas le plus grand des régulateurs médias de l’Union européenne, il n’en est pas moins fort investi au sein de l’ERGA. Depuis 2019, il occupe la vice-présidence et a pleinement contribué à des dossiers importants comme le souligne Tobias Schmid. “Au cours des deux dernières années, l’ERGA a montré qu’il était en mesure de faire face aux menaces qui attendant notre société dans le monde en ligne. Notre force réside dans la cooperation. Etre unis dans la diversité est l’objectif déclaré de la l’UE et c’est ce que les régulateurs européens des médias accomplissent ensemble. Nos collègues belges y contribuent de manière significative. Je souhaite à Karim Ibourki du succès et du plaisir à presider une institution aussi importante que l’ERGA et je suis impatient de le voir poursuivre avec ambition les efforts que nous avons déployés récemment”, s’est-il réjoui.
En 2022, ce seront la liberté d’expression et la protection des droits fondamentaux des citoyen.ne.s européen.ne.s, en ce compris le respect de la vie privée (la protection des données à caractère personnel) et de la dignité humaine, qui seront au cœur des préoccupations de l’ERGA.
Les grands chantiers
Des chantiers titanesques sont déjà en cours, mais certains en sont encore au stade des fondations. La mise en œuvre concrète de la directive sur les services de médias audiovisuels (SMA) est l’un des projets phares des travaux de l’ERGA. Cette dernière offre un cadre commun pour réguler les médias partout en Europe et a fait entrer dans le giron de la régulation des acteurs majeurs comme Netflix, Disney et Amazon. « Aujourd’hui, on constate cependant que tous les États membres n’ont pas encore transposé la Directive SMA dans leur droit national », rappelle Karim Ibourki. « Sur le principe, cette directive est un pas de géant et va dans la bonne direction, car elle tend à répondre aux grands enjeux de la régulation des médias en Europe, mais c’est sur son application concrète qu’il faudra se pencher. Nous serons particulièrement attentifs à la manière dont les services de vidéos à la demande, comme Netflix, appliquent leurs nouvelles obligations, comme les quotas d’œuvres européennes et la mise en valeur de ces contenus dans leurs catalogues… », poursuit-il.
Ces 20 dernières années, le paysage numérique et audiovisuel a subi de grands bouleversements. Les intermédiaires en ligne, comme Facebook ou YouTube, sont devenus les champions de la transformation numérique en s’imposant sur le marché audiovisuel en quelques années à peine. Ces plateformes en ligne occupent une place essentielle dans notre quotidien, souvent pour le mieux en termes de liberté d’expression ou de partage d’information mais aussi pour le pire quand on songe à la désinformation, la dissémination de contenu haineux ou d’images pornographiques à destination de mineurs. Jusqu’à présent, seule la directive e-commerce permet d’encadrer ces plateformes, mais ses obligations sont minimes. Pour répondre à ces nombreux défis, la Commission européenne a présenté le Digital Services Act (DSA), un projet de règlement européen qui devrait voir le jour en 2022. Il vise à créer un environnement en ligne plus sécurisé et davantage protecteur des droits fondamentaux des citoyen.nes européen.nes en augmentant la responsabilité des plateformes en ligne en leur imposant de nouvelles obligations, avec comme base “ce qui est interdit dans la vie réelle doit l’être aussi sur les plateformes.
Ce règlement sera une autre priorité dans les travaux de l’ERGA en 2022. « Il s’agit ni plus ni moins du seul règlement d’envergure à l’échelle d’un continent pour réguler ces acteurs tentaculaires. L’Europe pourrait servir d’exemple, y compris aux Etats-Unis, pour autant que nous passions du texte à l’action. L’ERGA fera tout pour que les régulateurs européens soient impliqués dans la mise en œuvre de ce nouveau règlement, car si les plateformes ont une audience globale, les dégats sont locaux, qu’ils soient à l’echelle d’un individu ou d’un pays en particulier, insiste Karim Ibourki. « Dans le passé nous pensions que seul un Etat était capable de restreindre nos libertés. Le miracle des industries de la tech a fait que, aujourd’hui, nous avons acheté notre propre big brother (notre GSM) et nous le nourrissons chaque jour de nos données en surfant sur nos réseaux sociaux. Ces grands acteurs ont longtemps juré qu’ils pouvaient s’autoréguler, mais de nombreux événements et études ont montré que les dégats pouvaient être gigantesques et qu’en l’occurrence il fallait franchir le pas de la régulation et de la co-régulation. J’en veux pour preuve toute récente le témoignage de l’ancienne employée de Facebook et lanceuse d’alerte Frances Haugen qui était récemment invitée en audition publique par le Parlement européen. Le DSA, est notre seule chance avant longtemps d’imposer aux plateformes d’être régulées par des instances motivées par le seul intérêt des citoyen.nes . Nous sommes attendus au tournant ». Conclut le nouveau Président de l’ERGA.
L’ERGA en quelques mots
Le Groupe des régulateurs européens des services de médias audiovisuels (ERGA) réunit les Président.e.s et/ou Représentant.e.s de haut niveau des autorités de régulation nationales de l’audiovisuel. Conformément à son statut, l’ERGA fournit une expertise technique à la Commission européenne concernant la mise en œuvre cohérente de la directive sur les services de médias audiovisuels (directive SMA) dans tous les Etats membres, ainsi que toute question relative aux services des médias audiovisuels. En outre, l’ERGA remplit les tâches suivantes: partager les expériences et les bonnes pratiques concernant l’application du cadre réglementaire en matière de services des médias audiovisuels, en ce compris l’accessibilité et l’éducation aux médias; coopérer et fournir aux membres les informations nécessaires pour l’application de la directive SMA, notamment les articles 3, 4 et 7; émettre des avis sur les aspects techniques et factuels conformément à l’article 2, paragraphe 5 quater, l’article 3, paragraphes 2 et 3, l’article 4, paragraphe 4 point c), l’articles 28 bis, paragraphe 7.
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