Accessibilité en période électorale. monitoring du CSA

 

Le CSA publie son rapport de monitoring relatif à l’accessibilité des programmes aux personnes en situation de déficience sensorielle durant les deux périodes électorales de 2024. Trois ou quatre mois avant les élections, l’ensemble des médias de la Fédération Wallonie-Bruxelles doivent remettre un « dispositif électoral » qui détaille la manière dont ils vont couvrir les élections.

Ce dispositif doit respecter les principes du règlement électoral du CSA qui impose notamment aux éditeurs d’« assurer l’accessibilité de tout ou partie des programmes à caractère électoral, en fonction notamment de leurs moyens techniques, humains et financiers. » Une obligation qui, actuellement, n’impose pas de « quotas » spécifiques, mais qui appelle à prendre en compte la nécessité de rendre accessibles les programmes électoraux pour une partie des publics de nos médias. Le CSA s’est penché sur les effets concrets de cette mesure et a monitoré 540 programmes diffusés au cours des deux périodes précédant les deux scrutins électoraux de 2024 (du 27 mai au 9 juin et du 29 septembre au 13 octobre 2024) par 15 éditeurs privés et publics.

 

L’accessibilité concerne une part significative de la population 

Rendre accessibles leurs programmes, singulièrement durant une période importante pour les citoyennes et les citoyens comme les élections, représente un enjeu technique et financier pour les éditeurs, mais qui répond aux attentes d’une partie importante de la population et de nombreux profils.

Selon les chiffres de la Fédération Francophone des Sourds de Belgique, 16% de la population a des problèmes d’audition, dont 8.6% pour lesquels ces problèmes entraînent des répercussions sur leur vie quotidienne. Pour ces personnes, le sous-titrage et l’interprétation en langue des signes sont indispensables pour qu’un programme audiovisuel leur soit accessible. Une part non négligeable de la population pour laquelle le sous-titrage est utile voire indispensable est représentée par des personnes sans déficience auditive. Les publics plus jeunes dont les habitudes de consommation se tournent de plus en plus vers le sous-titrage, les personnes dont la langue maternelle n’est pas le français et qui éprouvent des difficultés à comprendre la langue à l’audition, ou encore les personnes qui écoutent le programme dans des environnements bruyants.

On considère enfin qu’en Belgique et dans les pays industrialisés, 1 personne sur 1000 est aveugle et 1 personne sur 100 est malvoyante (estimations de l’OMS). La cécité diminue au fil des ans, en revanche, la malvoyance tend à augmenter notamment en raison du vieillissement de la population. Pour ces personnes, l’audiodescription est souvent le seul moyen de rendre un programme audiovisuel accessible.

 

23% des programmes électoraux ont été rendu accessibles

 

Parmi les 543 programmes monitorés, 123 programmes étaient sous-titrés, interprétés ou disposaient de pictogrammes annonçant la présence de sous-titres, ce qui représente près du quart des programmes monitorés (23%). Ce taux est similaire sur les deux périodes électorales. Les résultats montrent également que les programmes d’information sont davantage rendus accessibles que les programmes consacrés spécifiquement aux élections (comme les débats notamment) : en moyenne, 29% de l’ensemble des programmes d’information étaient rendus accessibles au cours des deux périodes monitorées et précédant les scrutins. Ce taux est de 17% pour les programmes spécifiquement consacrés aux élections.

Ces résultats sont cohérents avec les informations transmises au sein des dispositifs électoraux et émettant, pour la plupart, des réserves quant à la faisabilité technique et financière de rendre accessibles les nombreux programmes électoraux qui se déroulent en direct, comme les débats.

Le monitoring constate que les sous-titres restent les plus utilisés pour rendre les programmes accessibles aux personnes en situation de déficience auditive. Les programmes sous-titrés représentent 80% de la totalité des programmes accessibles observés.

 

Une différence marquée entre les éditeurs publics et privés

 

Le CSA constate une différence marquée entre les éditeurs dans les investissements réalisés pour rendre accessibles les programmes durant la double période électorale. À eux seuls, la RTBF (la Une) et le média de proximité Vedia représentent plus de la moitié du volume total des programmes électoraux rendus accessibles, tous médias confondus. D’autres médias, comme Boukè et ACTV, ont rendu accessibles plus de 10% de leurs programmes électoraux, mais les résultats de la plupart des éditeurs se situent en dessous et 8 services sur 15 n’ont rendus accessible aucun de leurs programmes dédiés aux élections[1].

Boukè, TV Lux, et Qu4tre se distinguent quant à eux par la proportion de programmes d’information accessibles, y compris au moyen de l’interprétation en langue des signes.

Pour compléter ces résultats, une analyse spécifique s’est portée sur les plateformes de services non linéaires : les sites internet des éditeurs de médias de proximité et de LN24, Auvio, RTL Play et les chaînes YouTube des médias de proximité. Les résultats présentés sont issus d’observations réalisées en février 2025, soit plusieurs mois après la fin des périodes électorales. Vedia et la RTBF sont les éditeurs ayant mis à disposition le plus de programmes d’information et consacrés aux élections accessibles sur leur plateforme non linéaire respective. Les programmes d’information de BX1, NoTélé, TV Lux et Qu4tre sont sous-titrés sur leur site internet.

Aucun programme accessible ne fut observé sur les autres plateformes non linéaires et sites des éditeurs

Tant pour les programmes d’information que pour les programmes électoraux, les résultats sont exclusivement atteints grâce aux services de médias publics (RTBF et médias de proximité). Aucun programme d’information et électoral accessible ou annoncé comme tel ne fut observé sur les services de médias privés monitorés (RTL TVi et LN24).

 

Étendre les bonnes pratiques et renforcer les obligations 

 

Le monitoring du CSA révèle que l’accessibilité des programmes d’information, en particulier ceux consacrés aux élections, reste inégalement assurée. Si la RTBF et Vedia se distinguent par une couverture exemplaire, la majorité des éditeurs peinent à intégrer pleinement l’accessibilité lors de ces temps démocratiques cruciaux. Ce constat traduit davantage un manque de moyens qu’un manque de volonté, y compris chez les acteurs respectant les obligations du règlement actuel.

Malgré ces difficultés, des technologies existent et des initiatives inspirantes émergent chez les éditeurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles : interprétation en langue des signes via QR code pour les débats électoraux sur Télésambre et la RTBF, et des efforts remarquables de chaînes locales comme Boukè, ACTV et TéléMB. Ces bonnes pratiques, souvent déployées malgré des contraintes techniques et financières importantes, illustrent un engagement croissant pour une information accessible au plus grand nombre qui présente des synergies possibles.

Fort de ces enseignements, le CSA appelle à une réflexion collective, associant éditeurs et associations représentatives, pour renforcer le cadre réglementaire. Une clarification ou révision du règlement accessibilité ou du règlement électoral pourrait introduire des obligations spécifiques pour les programmes électoraux, tout en tenant compte des contraintes des éditeurs. L’objectif : garantir, avant les prochaines élections, une accessibilité accrue et équitable de l’information, afin de favoriser une participation démocratique réellement inclusive.

[1] En l’absence de pictogrammes réglementaires lors de la diffusion, les programmes de Télésambre n’ont pas pu être identifiés comme accessibles dans le cadre du monitoring, et n’ont donc pas été comptabilisés dans les résultats.

 

Consulter le rapport de monitoring 

Consulter notre section dédiée à l’accessibilité des programmes 

 

 

Accessibilités : infos utiles 

Disclaimer

🛑 Disclaimer – Concernant le monitoring de l’accessibilité des programmes électoraux 

Ce monitoring a été réalisé dans un objectif d’évaluation représentative de l’accessibilité des programmes d’information et des programmes consacrés aux élections diffusés durant les périodes électorales de juin et octobre 2024. 

Ce monitoring ne constitue pas un contrôle du respect des obligations des éditeurs en matière d’accessibilité mais un état des lieux ; Les résultats doivent être lus à la lumière des marges de manœuvre laissées par les règlements, notamment l’article 20 du règlement électoral, qui n’impose pas d’obligation stricte mais invite à la réflexion. Il ne vise pas l’exhaustivité, mais une représentativité des pratiques observées. Il a pour but de dresser un panorama des mesures mises en œuvre, de valoriser les bonnes pratiques, d’identifier les axes d’amélioration, et surtout, d’ouvrir la voie à une concertation constructive en vue d’améliorer l’accessibilité des contenus électoraux à l’avenir. 

Le monitoring repose sur une méthodologie rigoureuse et transparente, fondée sur les dispositifs électoraux transmis par les éditeurs, les informations disponibles au sein de leurs communications externes (Guide TV, sites internet), et les critères définis par les règlements en vigueur. Il est toutefois soumis à plusieurs contraintes techniques et structurelles susceptibles d’impacter les résultats observés et précisés au sein de la Note de monitoring.  

En effet, la disponibilité des sous-titres sur le système de monitoring peut être affectée par : 

  • leur transmission aux distributeurs via les intermédiaires spécialisés, 
  • leur mise à disposition par les distributeurs, 
  • leur activation effective au moment de l’enregistrement (bien que les sous-titres soient activés par défaut sur l’ensemble des services enregistrés, ce cas de figure reste peu probable), 
  • et la présence du pictogramme réglementaire lors de la diffusion. 

Le CSA rappelle que la présence du pictogramme est obligatoire pour garantir l’information des personnes en situation de déficience sensorielle et permettre l’identification des contenus accessibles lors des contrôles. En son absence, et si les sous-titres ne sont pas visibles, les contenus ne peuvent être comptabilisés, même s’ils ont été rendus accessibles par l’éditeur. 

Une fois les enregistrements réalisés, aucune vérification complémentaire n’est techniquement possible via notre système d’enregistrement. Les contenus non identifiés au moment du monitoring ne peuvent donc être réintégrés a posteriori dans les résultats chiffrés. Par ailleurs, les observations sur les services non linéaires ont été réalisées plusieurs mois après la diffusion, ce qui a pu limiter l’accès aux contenus. 

Les résultats présentés dans les tableaux reflètent donc les contenus signalés comme accessibles au moment du monitoring, et non l’ensemble des contenus effectivement rendus accessibles. 

Le CSA ne remet pas en cause la bonne foi des éditeurs quant à la mise en œuvre des mesures d’accessibilité. Plusieurs éditeurs ont transmis des éléments complémentaires (logs de diffusion, captures d’écran, liens vers les contenus accessibles), qui ont été pris en compte dans les commentaires associés aux tableaux. Des mentions explicites ont été ajoutées pour certains éditeurs afin de reconnaître leurs engagements déclarés et les efforts entrepris.