Elections : décision du CSA relatives au programme Dans Ma Commune

 

Le Collège d’autorisation et de contrôle du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) a adressé des avertissements à l’éditeur de RTL-TVI pour plusieurs manquements dans le cadre de la couverture des élections communales de 2024 au sein du programme « Dans ma commune ».  

Le CSA avait été saisi de plusieurs plaintes pour des débats consacrés aux communes de Charleroi, Nivelles, La Louvière, Uccle et Bastogne. Elles pointaient l’absence de représentants et représentantes de certaines listes lors de ces débats portant sur des enjeux locaux. Ceci pouvait potentiellement constituer une infraction à certaines dispositions du Règlement relatif aux programmes sur les services de médias audiovisuels en période électorale, adopté par le Collège d’avis du CSA et approuvé par arrêté du 14 décembre 2023 (dit « Règlement élections »). 

Durant la période qui précède les élections, ce règlement prévoit une série de règles, parmi lesquelles des dispositions visant à garantir la participation aux débats de l’ensemble des listes démocratiques candidates à l’élection, l’équilibre et la représentativité des différentes tendances idéologiques et philosophiques, ou encore la visibilité des « petites » listes.  

Bien que RTL estime avoir atteint un équilibre des différentes tendances sur l’ensemble de ses débats communaux pris dans leur globalité, les émissions dédiées aux localités visées par les plaintes n’ont pas permis de respecter les principes d’équilibre et de représentativité pour chaque localité prise individuellement. Elles ont, selon chaque commune concernée, invisibilisé tantôt des candidats Les Engagés, tantôt des candidats Écolo ou PTB, et à chaque fois en outre des plus petites listes. 

L’éditeur avait relevé que, selon lui, le CSA n’était pas compétent, en raison d’un arrêt rendu par le Conseil d’Etat en avril dernier, qui avait acté qu’en cas de plainte portant à la fois sur des enjeux légaux et des enjeux déontologiques (plainte dite « mixte »), l’intervention du Conseil de déontologie journalistique (CDJ) sur les enjeux déontologiques épuisait la compétence du CSA pour se prononcer sur les enjeux légaux. Dans sa décision, le Collège d’autorisation et de contrôle du CSA a rappelé, si besoin en était, qu’il respectait cet arrêt. Toutefois, dans le cas des cinq dossiers dont il est ici question, il s’est estimé compétent dès lors que les plaintes portaient exclusivement sur l’application de règles formelles prévues par le Règlement élections, sans soulever de question déontologique, et ne constituaient donc pas des plaintes mixtes.  

Compte tenu des griefs constatés, du caractère récurrent des mises en cause de l’éditeur pour ses programmes électoraux, et de l’importance fondamentale du respect des règles qui garantissent l’équité du processus démocratique, le Collège d’autorisation et de contrôle a décidé d’adresser des avertissements à RTL. 

 

Consulter les décisions : 

 

Elections : décision relative au programme « Dans ma commune » (Nivelles)

Elections : décision relative au programme « Dans ma commune » (Bastogne)

Elections : décision relative au programme « Dans ma commune » (Charleroi)

Elections : décision relative au programme « Dans ma commune » (Uccle)

Elections : décision relative au programme « Dans ma commune » (La Louvière)

 

Éléments de contexte : 

 

  • Les décisions adoptées par le Collège portent sur l’application du Règlement élections élaboré et adopté par le Collège d’avis du CSA, constitué de représentants du secteur désignés par le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le Règlement est approuvé par arrêté du Gouvernement, ce qui lui confère un caractère obligatoire. 

Consulter la composition du Collège d’avis 

  • Les griefs constatés relèvent des articles 10, 12 et 13 du Règlement : 

“Article 10 – Les éditeurs assurent l’objectivité, ainsi que l’équilibre et la représentativité des différentes tendances idéologiques, philosophiques et politiques dans les programmes d’information et les débats électoraux qu’ils diffusent. Lorsqu’un éditeur diffuse des programmes qui, pris individuellement, ne présentent pas toutes les tendances idéologiques, philosophiques et politiques de manière équilibrée, il doit assurer l’équilibre et la représentativité dans la programmation globale de son service, sur l’ensemble de la période électorale. A cette fin, il précise, dans les dispositions électorales visées à l’article 7, la manière dont l’équilibre et la représentativité seront assurés, en tenant compte du caractère linéaire ou non linéaire de son service.” 

Article 12 – Les débats électoraux revêtent un caractère contradictoire, soit par la diffusion de séquences portant sur diverses listes, soit par la mise en présence de plusieurs candidats de listes différentes ou de candidats et de journalistes, soit par la confrontation de candidats et de citoyens non candidats. En principe, les débats rassemblent l’ensemble des listes démocratiques candidates à l’élection. Si, pour des raisons pratiques d’organisation des débats, il est nécessaire de limiter le nombre de participants à ceux-ci, cette limitation sera fixée sur base de critères objectifs, raisonnables et proportionnés au but poursuivi de donner la parole à un maximum de tendances démocratiques. Ces critères sont inscrits dans le dispositif électoral visé à l’article 7. Les éditeurs ne diffuseront pas de débats la veille du scrutin, sauf cas d’urgence dûment motivé par des circonstances extraordinaires. 

“ Article 13 – Afin de fournir une information complète au public, les éditeurs veillent à assurer la visibilité, selon des modalités dont ils ont l’appréciation : 

  • des listes qui se présentent pour la première fois, 
  • des listes qui n’avaient pas d’élus à la suite des élections précédentes, 
  • des listes qui, sur la base des critères objectifs, raisonnables et proportionnés définis par l’éditeur, n’auraient pas accès aux débats visés à l’article 12.” 
  • Les décisions portent sur plusieurs débats électoraux diffusés dans le cadre de l’émission “Dans ma commune” sur RTL-TVi. Il s’agit de ceux consacrés aux communes de Charleroi, Nivelles, La Louvière, Uccle et Bastogne: 

Bastogne: Lors de ce débat, trois candidat.e.s étaient présent.e.s en plateau : le Bourgmestre de Bastogne, M. Benoît Lutgen (tête de la Liste du Bourgmestre – de base Les Engagés), Mme. Jessica Mayon (tête de la liste Ensemble – de base MR) et M. Louis Vaguet (deuxième de la même liste Ensemble). 

Outre ces deux listesseule une troisième liste (Respect) se présentait également pour le scrutin communal du 13 octobre 2024 à Bastogne et Bertogne. Aucun.e représentant.e de cette liste n’était cependant présent.e en plateau. 

Charleroi: Lors de ce débat, quatre candidat.es étaient présent.es en plateau : M. Thomas Dermine (tête de la Liste PS), M. Xavier Desgain (tête de la liste Ecolo), M. Anthony Dufrane (tête de la liste MR-IC), et Mme. Pauline Boninsegna (tête de la liste PTB). 

Outre ces quatre listesquatre autres listes se présentaient également pour le scrutin communal du 13 octobre 2024 à Charleroi, à savoir Les Engagés, Le Bien Commun, CC et MCW. Les listes Les Engagés et MCW étaient complètes, c’est-à-dire composées d’autant de candidat.es que de places à pourvoir (51), celle du Bien commun comportait treize candidat.es et celle de CC deux. Aucun.e représentant.e de ces listes n’était cependant présent.e en plateau. 

La Louvière: Lors de ce débat, trois candidats étaient présents en plateau : le Bourgmestre sortant, M. Jacques Gobert (tête de la liste PS), M. Olivier Destrebecq (tête de la liste MR) et M. Xavier Papier (tête de la liste Les Engagés & Alternatives). 

Outre ces trois listestrois autres listes se présentaient également pour le scrutin communal du 13 octobre 2024 à La Louvière, à savoir PTB, CC et Lutte ouvrière. La liste PTB était complète, c’est-à-dire composée d’autant de candidat.es que de places à pourvoir (43), celle de CC comportait deux candidat.es, et celle de Lutte ouvrière trois. Aucun.e représentant.e de ces listes n’était cependant présent.e en plateau. 

Nivelles: Lors de ce débat, trois candidats étaient présents en plateau : le Bourgmestre sortant, M. Pierre Huart (tête de la liste LB – de base MR), M. Bernard De Ro (tête de la liste Les Engagés) et M. Robert Vertenueil (tête de la liste PluS – de base PS). 

Outre ces trois listestrois autres listes se présentaient également pour le scrutin communal du 13 octobre 2024 à Nivelles, à savoir Ecolo, Défi et Mouvement citoyen nivellois (MCN). Ces trois listes étaient complètes, c’est-à-dire composées d’autant de candidat.es que de places à pourvoir (29). Aucun.e représentant.e de ces listes n’était cependant présent.e en plateau. 

Uccle: Lors de ce débat, trois candidats étaient présents en plateau : le Bourgmestre sortant, M. Boris Dilliès (tête de la Liste du Bourgmestre – de base MR et Défi), M. Thibaud Wyngaard (tête de la liste Ecolo-Groen) et M. François Beyens (quatrième de la liste Les Engagés). 

Outre ces trois listesquatre autres listes se présentaient également pour le scrutin communal du 13 octobre 2024 à Uccle, à savoir PS, Uccle en avant, NVA et CC. La liste PS était complète, c’est-à-dire composée d’autant de candidat.es que de places à pourvoir (43), celle de Uccle en avant comportait trente-neuf candidat.es, celle de la NVA six et celle de CC deux. Aucun.e représentant.e de ces listes n’était cependant présent.e en plateau. 

  • Le 20 février 2025, le Collège d’autorisation et de contrôle avait également adopté pour le même scrutin une décision analogue concernant le programme « Les 48 heures des Bougmestres » ne donnant la parole qu’aux Bourgmestres. 

> Consulter le communiqué de presse 

  • Le 15 avril 2025, le Conseil d’État a annulé une décision du CSA relative à la diffusion de communication commerciale dans le JT de La Une (RTBF).  L’arrêt clarifie un conflit d’interprétation du décret du 30 avril 2009 « réglant les conditions de reconnaissance et de subventionnement d’une instance d’autorégulation de la déontologie journalistique » (dit « décret CDJ »), qui articule les compétences entre le CSA et le CDJ.    

Le conflit portait tout particulièrement sur un article équivoque de ce décret, dont la formulation laissait place à plusieurs interprétations possibles. Il concerne les dossiers « mixtes », c’est-à-dire portant sur un programme d’information et recouvrant à la fois une disposition décrétale et une disposition déontologique. Le Conseil d’Etat a entériné l’interprétation du CDJ selon laquelle, dans les programmes d’information, l’intervention du CDJ sur l’aspect déontologique d’une plainte mixte épuise la compétence du CSA sur son aspect décrétal.    

Le CSA en a pris acte et a déclaré s’y conformer, tout en relevant qu’en l’espèce, les plaintes reçues n’étaient pas mixtes, raison pour laquelle il ne les a d’ailleurs pas transmises au CDJ. 

Le CSA rappelle que la législation audiovisuelle donne compétence à son Collège d’avis pour adopter un règlement sur la manière dont les éditeurs de médias audiovisuels doivent assurer l’information politique en période électorale. Une interprétation extensive de l’arrêt du Conseil d’Etat (c’est-à-dire comme portant sur toutes les plaintes relatives à des programmes d’information, même lorsqu’elles soulèvent uniquement des enjeux légaux et ne sont donc pas mixtes) comporte le risque de priver le CSA du contrôle démocratique qu’il exerce comme autorité indépendante de régulation sur la couverture des élections, et le placerait dans une situation où il adopterait des règlements sans ensuite pouvoir les appliquer. 

Consulter le Communiqué de presse du CSA du 18 avril 2025