Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a décidé de sanctionner l’éditeur RTL Belgium d’un avertissement pour ne pas avoir assuré l’équilibre et la représentativité des différentes tendances politiques dans son programme « 48 heures des Bourgmestres » diffusé durant la période pré-électorale de trois mois qui a précédé les élections communales d’octobre 2024. Pendant une telle période pré-électorale, l’ensemble des médias audiovisuels de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) doivent respecter le « règlement relatif aux programmes de radio et de télévision en période électorale » du CSA et ses objectifs, dont l’équilibre des tendances politiques est l’un des piliers.
Le CSA a été saisi de plusieurs plaintes concernant l’opération « 48 heures des Bourgmestres », programme phare de l’éditeur pour couvrir les élections communales. L’opération consistait, durant 48 heures, à inviter les bourgmestres sortants de chacune des 281 communes de Bruxelles et de Wallonie pour des interviews individuelles diffusées en direct et en replay sur les plateformes RTL Play et RTL Info. Les plaignant.es dénonçaient une possible atteinte au règlement du CSA dans la mesure où seuls les bourgmestres sortants étaient invité.es à s’exprimer dans ce format, alors que les autres listes politiques locales ne disposaient pas d’une vitrine similaire pour pouvoir s’exprimer.
Après la diffusion de l’opération, le CSA a décidé d’ouvrir une instruction qui a mené à la notification d’un grief et à l’audition de l’éditeur. Ce dernier s’est défendu en mettant en avant le caractère innovant et l’intérêt journalistique de son programme. Il a insisté sur la nature inédite de son format, conçu spécifiquement pour la Belgique francophone, son caractère digital, et son approche immersive sous forme de marathon. L’éditeur a également souligné l’ampleur de la préparation nécessaire à l’émission, qui a impliqué un travail en amont de plusieurs mois pour contacter les bourgmestres et structurer les interviews. D’autre part, RTL Belgium défend une approche globale de l’équilibre politique plutôt qu’un équilibre au niveau de chaque commune. Il reconnaît que son programme n’a pas permis une stricte représentativité locale des différentes tendances politiques, mais il affirme avoir compensé cela par l’ensemble de ses autres programmes électoraux qui auraient, selon lui, permis d’atteindre un équilibre global des différentes forces politiques.
Dans sa décision, le CSA ne remet pas en cause l’intérêt journalistique du format défendu par l’éditeur, mais il rappelle que cela ne permet pas de justifier le défaut de représentativité des listes politiques locales généré par cette émission. Le fait que les bourgmestres aient été interviewé.es par des journalistes qui leur ont apporté une contradiction ne suffit pas non plus à pallier l’absence des autres candidats et des autres listes politiques.
Par ailleurs, le CSA a rappelé que les principes d’équilibre et de représentativité doivent s’apprécier en tenant compte du niveau de pouvoir concerné par l’élection, en l’occurrence le niveau communal.
Si un programme ne donne de la visibilité qu’à une seule tendance présente dans une commune, l’éditeur peut encore rééquilibrer la situation en donnant de la visibilité aux autres tendances de la même commune dans d’autres programmes. Ces derniers doivent permettre d’atteindre un équilibre et une représentativité commune par commune, ce qui n’a pas été le cas après analyse de l’ensemble de la programmation électorale de l’éditeur. Parmi les autres programmes, le seul qui puisse être considéré comme comparable aux « 48 heures des Bourgmestres » est « Dans ma commune » dont chaque édition était consacrée à une commune et aux enjeux purement locaux de celle-ci, et faisait directement intervenir des candidats et candidates de ces communes. Or, ce programme n’a été diffusé que pour dix-neuf communes (sur 281 communes au total en Wallonie et à Bruxelles). Il n’a donc pas pu permettre de rétablir l’équilibre entre partis dans les 262 autres communes.
L’éditeur – qui contestait à l’époque la compétence du CSA – a déjà fait l’objet d’une sanction pour les mêmes faits lors du précédent scrutin communal de 2018. En 2024, les services du CSA ont assuré leur mission d’information prévue par le règlement et ont pris contact avec l’éditeur pour l’avertir de la réception d’une première plainte avant la nouvelle diffusion du programme et lui rappeler la jurisprudence en vigueur. Toutefois, l’éditeur n’a pas pris toute la mesure de cette jurisprudence. Aussi, après délibération, le Collège du CSA a décidé d’adresser à l’éditeur RTL Belgium un avertissement.
Le Collège invite l’éditeur à mener une réflexion sur la manière d’assurer une représentation équilibrée des différentes tendances lors des prochaines élections communales.
Les dossiers d’instructions dans le cadre des élections communales
Les élections communales et provinciales d’octobre 2024 ont engendré trois fois plus de dossiers d’instruction au CSA que durant les élections de juin 2024. Au total, 12 instructions ont été ouvertes sur la base de plaintes ou d’autosaisine du CSA, dont 8 sont toujours en cours. 9 d’entre elles relèvent d’une infraction potentielle en matière d’équilibre des tendances politiques durant un programme électoral. Ces instructions concernent le programme “Dans Ma Commune” édité RTL Belgium, ainsi que des programmes électoraux des médias de proximité Télésambre et Boukè. Enfin, la dernière instruction en cours concerne une capsule vidéo du Bourgmestre sortant d’Andenne Claude Eerdekens diffusée sur les réseaux sociaux de Boukè.