
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) publie ses avis 2025 relatifs au contrôle des obligations des distributeurs opérant en Fédération Wallonie-Bruxelles pour l’exercice 2024. Les opérateurs Proximus, Telenet, VOO, Auvio, Orange, Base et BeTv ont tous transmis les informations nécessaires au contrôle annuel et respecté, dans leur grande majorité, les obligations qui leur incombent en matière de transparence, de droits d’auteur, de publicité, de financement des médias de proximité ou encore de must-carry. Ces obligations visent à garantir une distribution équitable, un marché audiovisuel transparent et la protection des consommateurs.
Pour la première fois, un monitoring complet a également été mené afin d’évaluer non seulement les distributeurs régulés, mais aussi les intermédiaires non régulés qui occupent une place dans l’accès aux contenus, à savoir les télévisions connectées, les services de streaming, les plateformes de gaming. Ce monitoring porte sur des thématiques essentielles comme la protection des mineurs, l’accessibilité, la publicité et le positionnement des chaînes locales. Les conclusions du monitoring mettent en lumière plusieurs défis : des progrès restent nécessaires, notamment en matière d’accessibilité pour les personnes en situation de déficience sensorielle.
Le CSA rappelle également le rôle crucial des distributeurs dans le financement des médias de proximité, qui ont bénéficié en 2024 de 3,9 millions d’euros de contributions. Les analyses confirment enfin une évolution profonde des usages : le recours aux équipements connectés continue sa progression, les consoles et télévisions connectées deviennent des portes d’entrée privilégiées vers les contenus audiovisuels, et les formules d’abonnement évoluent au détriment des offres incluant la télévision classique. Cette transformation révèle une asymétrie croissante entre les distributeurs régulés et les nouveaux intermédiaires technologiques, qui échappent aujourd’hui au cadre réglementaire alors même qu’ils influencent massivement l’accès aux contenus. Le CSA alerte sur les risques que cela fait peser sur le pluralisme, la diversité culturelle et la protection des publics, et appelle à faire évoluer le cadre législatif pour intégrer ces nouveaux acteurs, suivant l’exemple d’initiatives déjà prises, notamment en Flandre.Face à ces mutations, le CSA poursuit sa mission d’information du public à travers son site Les Repères du Numérique, qui centralise chaque année les tendances et données essentielles du secteur afin d’accompagner les citoyens dans leurs choix et leur compréhension d’un paysage audiovisuel en pleine transformation.
Le rôle des distributeurs auprès des médias de proximité
Les distributeurs jouent un rôle clé dans le financement des médias de proximité. Ils doivent verser une contribution annuelle qui est calculée soit par rapport au nombre d’abonnés, soit sur leurs recettes. En 2024, l’ensemble des distributeurs ont versé 3,99 millions d’euros aux médias de proximité. Ils doivent contribuer à hauteur de 3,29€ par abonné. Le montant de la contribution des distributeurs envers les médias de proximité est en constante augmentation depuis 2021, après avoir connu une baisse entre 2017 et 2021.
Les distributeurs ont également des obligations en matière de Must Carry qui leur imposent de proposer les chaînes publiques néerlandophones, germanophones et francophones, en ce compris les médias de proximité.
La référence des services américains en matière d’accessibilité
Le CSA s’est penché sur le respect des obligations des distributeurs en matière d’accessibilité. Ces derniers doivent rendre l’ensemble de leurs services accessibles aux personnes en situation de déficience sensorielle sans aucun surcout. L’accès aux fonctionnalités d’accessibilité doit être simple. Le public doit être informé de ces fonctionnalités et les pistes d’audiodescription doivent être clairement identifiées.
Le monitoring révèle que les distributeurs répondent aux attentes en matière d’accessibilité, mais des efforts supplémentaires devraient être fournis pour mieux rencontrer certaines obligations, notamment celle qui concerne la facilité d’accès aux mesures d’accessibilité. Certains éprouvent également des difficultés à intégrer correctement les pistes de sous-titrages et certaines pistes d’audiodescription manquent de clarté.
Les fonctionnalités proposées par les distributeurs belges restent cependant en dessous de ce qui est proposé par leurs concurrents, principalement américains comme les services de streaming ou les consoles de jeux. Ces derniers proposent de nombreuses fonctionnalités de personnalisation : lecture d’écran personnalisable, zoom du menu, réglage du contraste, transcription des dialogues et paramétrage des sous-titres, personnalisation des paramètres audio, désactivation des effets sonores, commandes vocales, notamment via Google Assistant.
Près de la moitié des distributeurs proposent désormais de la publicité ciblée
Proximus, Telenet et Auvio proposent désormais de la publicité ciblée à leurs utilisateurs. L’ensemble des distributeurs respectent globalement leurs obligations en matière de communication commerciale.
Les principaux acteurs analysés démontrent une approche globalement transparente et respectueuse du consentement en matière d’utilisation des données personnelles. Proximus et Telenet sollicitent le consentement dès l’installation, permettent un retrait à tout moment et informent clairement sur les traitements de ces informations, tout en offrant plusieurs niveaux de confidentialité, dont un sans publicité ciblée (cinq pour Proximus, quatre pour Telenet). RTBF Auvio se distingue par une information très détaillée sur ses partenaires, les finalités et les données utilisées, ainsi qu’une gestion simple et centralisée des préférences via le profil utilisateur. Enfin, Orange, bien qu’elle ne recoure pas à la publicité ciblée, anticipe les évolutions du secteur en recueillant déjà le consentement pour l’utilisation des données personnelles, assurant ainsi une conformité proactive.
Les acteurs non-régulés sur le devant de la scène
La consommation de la télévision connaît d’importantes évolutions. Le décodeur des distributeurs n’est plus le seul équipement pour accéder aux chaînes ou applications qui proposent du contenu audiovisuel. Selon la dernière étude du CIM, les smartphones sont devenus le principal équipement des foyers, suivi de la télévision. D’autres équipements prennent désormais une place grandissante comme les PC, les tablettes, mais aussi les consoles de jeux dont sont équipés plus de 70% des 12-24 ans, mais aussi près de 50% des 65 ans et plus. Le fait de disposer d’un téléviseur ne garantit pas non plus la souscription à un abonnement pour la télévision auprès d’un distributeur puisque la plupart des téléviseurs sont désormais connectés et proposent un accès à de nombreuses applications sans passer par un décodeur. La télévision linéaire domine toujours chez les 45 ans et plus, mais la consommation de contenus audiovisuels sur YouTube est devenue majoritaire chez les 12-44 ans.
Alors que ces équipements dominent de plus en plus le marché, le CSA constate dans la dernière étude de l’IBPT[1] une baisse légère mais constante du nombre d’abonnements aux distributeurs depuis quelques années avec un total de 1.218.728 abonnements pour la Fédération Wallonie-Bruxelles en 2024, contre 1.343.188 en 2021.
Les données chiffrées relatives au nombre d’abonnés par type d’offres groupées des distributeurs montrent aussi un accroissement du nombre d’abonnés aux offres Internet à large bande fixe et mobile et une baisse du nombre d’abonnés aux offres groupées Internet et télévision.
Concrètement, les consommateurs ont de moins en moins tendance à souscrire à une offre « triple play » comprenant la télévision au profit d’une offre « duo-play » sans télévision qui délaisse les décodeurs des distributeurs au profit d’une offre internet fixe et mobile uniquement. Avec les télévisions connectées (Samsung, LG, TCL), les enceintes intelligentes (Google, Amazon, Apple) et les appareils multimédias, (Google TV, Apple TV, Fire TV), les utilisateurs ont accès aux services tels que Pickx TV, Auvio, etc. sans passer par les décodeurs des distributeurs. Alors que les habitudes de consommation évoluent, les acteurs intermédiaires échappent aux obligations réglementaires imposées aux distributeurs traditionnels en Fédération Wallonie-Bruxelles, créant une situation d’asymétrie entre les acteurs régulés et ces acteurs intermédiaires.
Cette réalité peut nuire à la visibilité des contenus audiovisuels locaux. Les distributeurs étant tenus de mettre en valeur certains services audiovisuels d’intérêt général, ce qui n’est pas le cas des télévisions connectées ou des consoles de jeux par le biais desquelles les utilisateurs consomment de plus en plus les contenus audiovisuels.
Le CSA a déjà sollicité le Gouvernement quant à la nécessité de prendre en compte ces nouveaux acteurs du numérique qui jouent un rôle croissant dans la distribution de contenus et services audiovisuels et appelle à adopter des dispositions pour ces acteurs spécifiques, afin de protéger des valeurs essentielles comme le pluralisme médiatique, la diversité culturelle, la protection des mineurs et la proéminence des services d’intérêt général. Des initiatives, notamment en Flandre, ont déjà permis d’imposer des obligations à ces nouveaux acteurs, dont certaines ont fait l’objet de remarques la part de la Commission Européenne sans toutefois remettre en cause la pertinence de l’objectif.
[1] Situation du secteur des communications électroniques 2024: présentation | IBPT
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Les tendances en quelques chiffres