L’Organe des régulateurs européens des communications électroniques (BEREC), dont est membre l’IBPT, a adopté le 30 août des lignes directrices sur la neutralité du net. Ces dernières donnent un cadre plus précis à la mise en œuvre de ce principe par les régulateurs nationaux. Ce document est la conclusion d’une consultation publique tenue cet été sur le sujet et l’analyse des 481.547 contributions reçues. L’occasion pour le Conseil supérieur de l’audiovisuel de revenir sur l’enjeu que représente la neutralité du net pour l’accès aux services de médias audiovisuels en ligne.

 

 

Le principe de neutralité du net

 

Ce principe a été consacré par l'Union européenne lors de l’adoption en novembre 2015 d’un règlement établissant des mesures relatives à l’accès à un internet ouvert[1], entré en vigueur le 30 avril dernier. Il prévoit que tous les flux de données sur le net doivent être traités de manière égalitaire et ce, quels que soient le contenu, l'origine, le service ou encore le destinataire.

 

L’objectif est d’empêcher tout acte consistant à brider un service au profit d’un autre pour favoriser un acteur au détriment d’un autre, de manière à garantir à tous les internautes le droit à l'accès au contenu de leurs choix. Ainsi les contenus légaux ne seront pas bloqués, les services ne seront pas ralentis, les différents fournisseurs auront un accès ouvert aux consommateurs, etc.

 

Les régulateurs des communications électroniques européens, dont l’IBPT et les régulateurs communautaires (CSA, VRM et Medienrat) pour la Belgique, sont chargés de la mise en œuvre de ce règlement et de surveiller étroitement son application.

 

Enjeu pour l’accès aux médias audiovisuels

 

Internet est un espace crucial pour accéder à l’information en général et aux divers médias en particulier. L’enjeu pour l’audiovisuel est particulièrement important. Avec plus de 68% des internautes qui regardent des vidéos ou des programmes TV sur Internet[2] et plus d’1,3 million de consommateurs quotidiens de vidéo en ligne (streaming) en Belgique[3], le réseau de transfert de données s’est en effet transformé en une véritable plateforme de médias audiovisuels. La consommation de vidéo est même le premier vecteur de trafic sur le net puisqu’elle représente plus de 70% du trafic IP mondial et devrait même atteindre 82% d’ici 2020[4]. Le traitement de ce type de contenus par les fournisseurs d’accès à internet (FAI) – qui traitent les flux de données en ligne – peut dès lors avoir un impact important sur l’accès aux médias audiovisuels.

 

Nous revenons brièvement dans les lignes qui suivent sur les trois points principaux du règlement et des lignes directrices. 

 

Gestion du trafic sur le net

 

Suivant les règles établies, les opérateurs peuvent mettre en place des « mesures de gestion raisonnable du trafic » pour assurer le bon fonctionnement d'Internet. Ces mesures doivent être jugées raisonnables et donc être transparentes, proportionnées, non discriminatoires et reposer sur des exigences techniques  en matière de qualité de service de certaines catégories spécifiques de trafic (latence, perte de paquet, etc…) et non sur des considérations commerciales. Le blocage et la limitation des services ne seront autorisés que dans un nombre limité de cas (cyberattaque, congestion exceptionnelle ou temporaire, contenu illégal, etc.) et limités à une durée nécessaire.

 

La possibilité de fournir certains « services spécialisés »

 

Il est également pris en considération l’évolution des offres des fournisseurs de contenus et de services et la nécessité pour certains services, dits spécialisés, d’obtenir des niveaux de qualité spécifiques non garantis par les services d’accès à Internet. C’est pourquoi des accords seront autorisés sur les services optimisés pour des contenus spécifiques tels que les services de diffusion linéaire de télévision sur IP (streaming) nécessitant des exigences en matière de qualité. Cependant, les opérateurs devront veiller à ce que ces « services spécialisés » :  

 

  • Ne soient pas mis en place au détriment de la disponibilité ou de la qualité générale des services d’accès à Internet pour les utilisateurs finals ;
  • Ne soient pas utilisables comme services d’accès à Internet ni proposés en remplacement de ces derniers ;
  • Tiennent compte de la capacité du réseau qui doit être suffisante pour fournir ces services.

 

Les pratiques commerciales des fournisseurs d’accès à Internet

 

Des précisions sur les pratiques commerciales des fournisseurs d’accès à Internet ont également été apportées. Si ces dernières ne sont pas interdites a priori, elles ne peuvent pour autant pas avoir pour effet de limiter l’exercice des droits des utilisateurs finals. Ainsi des relations contractuelles incluant des conditions sur la tarification, les volumes de données, le débit, etc. pourront être considérées comme légales. Il appartiendra aux ARN d’évaluer l’existence de telles conditions commerciales en prenant en compte par exemple les effets sur les droits des consommateurs. Cela implique notamment d’évaluer les effets de ces pratiques sur la diversité des contenus, afin de veiller au respect de la liberté d’expression et d’information ainsi que le pluralisme des médias. 

 

Conseil supérieur de l’audiovisuel

 

Lire aussi: 

 

Tout ce que vous devez savoir sur la neutralité du net

Lignes directrices de l’ORECE 

Présentation pour la conférence de presse 

Accès aux médias audiovisuels – Plateformes et enjeux, qui se penche notamment sur la question de la neutralité du net.

 


[1] Règlement (UE) 2015/2120 du parlement européen et du conseil du 25 novembre 2015.

[2] CIM Other Screen Monitor 2015 (vague 3 + 4, N=4532), Population Belge ayant accès à l’Internet

[3] RMB, Etude MediXperience 2016

[4] Cisco VNI Forecast 2015-2020.