Production propre

Contexte

En vertu de l’article 11 de son Contrat de gestion, la RTBF doit privilégier la production propre des programmes de ses services audiovisuels.

L’article précise que : « La RTBF programme, en moyenne journalière calculée par année civile, dans ses services de médias audiovisuels linéaires relevant du service universel, au moins 10h de programmes audiovisuels réalisés en production propre, et au moins 20h de programmes de radio réalisés en production propre, en ce compris les éventuelles rediffusions effectuées d’une année à l’autre »[1].

Le Contrat de gestion prévoit par ailleurs que dans le cadre de la convergence des médias, les chaînes de télévision peuvent proposer des programmes composés d’une retransmission filmée en direct du programme des chaînes de radio, les programmes de production propre pouvant être comptabilisés tant en radio qu’en télévision.

Enfin, l’article 2.l) du Contrat de gestion précise que les coproductions sont comptabilisées au prorata du budget réellement engagé par la RTBF dans le budget de production[2].

 

[1] Dans le Contrat de gestion précédent, ces durées s’élevaient respectivement à 9h de programmes télévisés et 18h de programmes de radio.
[2] Exemple : si la RTBF investit 100.000 euros dans un budget de production total de 500.000 euros, la durée du programme ainsi coproduit est comptabilisée comme de la production propre à hauteur de 20%.

Bilan

Télévision

En 2020, la RTBF a diffusé, en moyenne journalière calculée par année civile, 31h59 de programmes audiovisuels réalisés en production propre sur ses trois chaînes linéaires, soit une moyenne quotidienne de 10h40 de production propre par service.

La production propre telle que comptabilisée inclut :

  • Les programmes diffusés en première diffusion(hors radio filmée) : 27 % du volume total de production propre (8h31 pour les 3 services cumulés, soit 2h50 en moyenne par service) ;
  • Les rediffusions[1] : 62 % du volume total de production propre (19h54 pour les 3 services cumulés, soit 6h38 en moyenne par service). Ces rediffusions sont constituées à 88% de rediffusions de programmes au cours de la même année, et 12% de rediffusions d’une année à l’autre ;
  • Les programmes de radio filmée[2]: 11 % du volume total de production propre (3h34 pour les 3 services cumulés, soit 1h11 en moyenne par service).

Cette répartition reste globalement stable d’année en année.

[1] Tant les programmes rediffusés d’une année à l’autre que ceux rediffusés au cours de la même année.
[2] Remarque méthodologique : Bien que constituant au sens strict des programmes primo-diffusés, les programmes de radio filmée ont été comptabilisés à part étant donné leur statut et leur volume. En incluant ceux-ci dans la catégorie « première diffusion », les premières diffusions représentent 38% de la durée totale de production propre.

Considérée par service, seule la Une atteint 10 heures de production propre journalière, qu’elle dépasse largement. Néanmoins, le seuil est rencontré en moyenne sur les 3 chaînes, l’importante diffusion de production propre sur la Une permettant de contrebalancer une diffusion moindre de programmes produits en propre sur la Deux et la Trois.

Evolution de la durée de production propre sur les services télévisuels

Malgré une augmentation des obligations en matière de production propre entre les 4e et 5e contrats de gestion, on observe une diminution de la durée de production propre diffusée par l’éditeur ces 3 dernières années : 12h28 par chaîne et par jour en moyenne en 2018, 11h17 en 2019, 10h40 en 2020, soit une diminution moyenne de 8% chaque année.

Types de programmes produits en propre

La RTBF déclare comme production propre trois types de programmes : les productions (programmes 100% RTBF), les coproductions (dont la durée est comptabilisée au prorata de l’investissement de la RTBF) et les « programmes composés », que la RTBF définit comme « un programme qui comporte une partie de programmes achetés, préachetés, commandés et/ou coproduits par un tiers et une partie de programme réalisé par la RTBF ». En 2020, la durée de production propre était répartie comme suit : 95% de productions, 1% de coproductions (prorata de la contribution de la RTBF) et 4% de programmes composés. Cette répartition reste globalement stable d’année en année.

Programmation globale de l’éditeur

Dans l’ensemble, la production propre représente 47% du temps de diffusion total des services télévisuels linéaires de la RTBF. Les 53% de temps de diffusion ne constituant pas de la production propre sont composés des achats (47%) et des durées équivalant aux parts des autres coproducteurs dans les coproductions (6%).

Radio

La RTBF a dépassé en 2020 le seuil de 20 heures de production propre quotidienne sur chacun de ses huit[1] services. Ces durées restent stables d’année en année.

 

[1] Les données pour le service linéaire DAB+ Tarmac ne nous ont pas été communiquées mais d’après la liste des programmes achetés, ce service remplit également son obligation de production propre.

Pour l’entièreté de ses services radiophoniques, la RTBF comptabilisait en 2020 une moyenne de 153 heures et 42 minutes par jour de production propre, soit une moyenne de 21 heures et 57 minutes de production propre journalière par service.

La production propre représente 98.62% du temps de diffusion global (hors publicité) des radios

Les achats représentent une moyenne de 1.1% du temps de diffusion total, les programmes coproduits représentent 0,48% du temps total de diffusion total et la production RTBF (hors parts en coproductions) représente 98,42% du temps total de diffusion.

QUESTIONS EN SUSPENS ET CLARIFICATIONS SOUHAITÉES

Comptabilisation et services concernés

Le Contrat de gestion prévoit actuellement que « La RTBF programme, en moyenne journalière calculée par année civile, dans ses services de médias audiovisuels linéaires relevant du service universel, au moins 10h de programmes audiovisuels réalisés en production propre, et au moins 20h de programmes de radio réalisés en production propre (…) ». La formulation de cet article ne permet actuellement pas de déterminer le mode de comptabilisation et les services concernés par cette durée : les durées indiquées doivent-elles être atteintes sur tous les services pris collectivement (10h de production propre sur les trois services télévisuels cumulés ; 20h sur les huit services radiophoniques cumulés), ou par service (10h sur chaque service télévisuel et 20h sur chaque service radiophonique, à tout le moins en moyenne) ?

Actuellement, en l’absence de précisions, le CSA interprète l’article 11 de la manière la plus large possible. Néanmoins, l’analyse du Contrat de gestion ainsi que les constats effectués lors des différents contrôles de l’éditeur invitent à adopter une interprétation plus restrictive, selon laquelle les quotas de 10h et 20h de programmes produits en propre devraient être rencontrés sur chacun des services télévisuels et radiophoniques de l’éditeur, à tout le moins en moyenne. Différents éléments viennent appuyer cette interprétation :

  • Premièrement, une comptabilisation par service semble répondre à l’intention générale du Contrat de gestion qui stipule que la RTBF privilégie la production propre dans ses programmes. La portée de cet article serait en effet bien moindre si les quotas devaient être rencontrés sur les services pris cumulativement : à titre d’exemple, en télévision, la durée minimale de production propre équivaudrait à une moyenne de 3h20 de programmes produits en propre par chaîne par jour. En radio, elle s’élèverait à moins de 3h par jour par service. Cela pose question au regard de l’intention présumée du législateur, a fortiori si les durées de production propre intègrent, comme le Contrat de gestion le prévoit actuellement, les programmes rediffusés et les programmes de radio filmée.
  • Par ailleurs, la RTBF rencontre déjà actuellement et de manière stable ces quotas par service, à tout le moins en moyenne. En radio, la durée de 20h par jour est chaque année rencontrée par la RTBF sur chacun de ses services. En télévision, si chaque service pris séparément n’atteint pas le seuil de 10h, celui-ci est rencontré chaque année en moyenne (les durées plus élevées de production propre sur la Une contrebalançant celles de la Deux et la Trois).
  • Prévoir une durée par service permet enfin à la RTBF d’ajouter ou supprimer des services télévisuels ou radiophoniques sans impacter négativement le volume de production propre proposé au public sur chacune de ses chaînes.
  •  Le Contrat de gestion gagnerait dès lors à préciser le mode de comptabilisation de ces durées de production propre. A titre d’exemple, l’actuel article 19 du Contrat de gestion (relatif aux quotas de diffusion) précise que les quotas doivent être atteints par la RTBF « dans l’ensemble et sur chacun des services ». Cette formulation permet d’éloigner tout doute quant au mode de comptabilisation employé.

Statut des rediffusions

L’article 11 précise que la durée de production propre comprend les éventuelles rediffusions effectuées d’une année à l’autre.

Dans sa formulation, l’article n’aborde pas le statut des rediffusions effectuées au sein d’un même exercice. Actuellement, le CSA comptabilise ces programmes multidiffusés au cours d’une même année comme de la production propre. Cet élément gagnerait néanmoins à être précisé, le volume des rediffusions de programmes au cours d’une même année représentant, en télévision en 2020, 88% des rediffusions, soit 55% du volume total de production propre. En effet, s’il était décidé de ne plus le comptabiliser, les quotas de production propre pourraient ne plus être rencontrés.

Statut de la radio filmée

Le Contrat de gestion prévoit que dans le cadre de la convergence des médias, les chaînes de télévision peuvent proposer des programmes composés d’une retransmission filmée en direct du programme des chaînes de radio, les programmes de production propre pouvant être comptabilisés tant en radio qu’en télévision. Les programmes de radio filmée sont donc inclus dans le calcul des durées de production propre des chaînes de télévision.

Le CSA réitère ses constats des années précédentes concernant la prise en compte de ces formats : Il rappelle notamment que les programmes de radio filmée sont à ce jour exclus de la comptabilisation de la production propre des médias de proximité[1]. Si la prise en considération de la radio filmée devait néanmoins être maintenue dans le prochain Contrat de gestion, il conviendrait de rester attentif à son volume (actuellement 11% du volume total de production propre).

Statut des programmes composés en télévision

Lors de ses contrôles annuels, le CSA observe qu’en télévision, la RTBF déclare comme production propre, outre les programmes produits intégralement par la RTBF et des programmes coproduits, ce qu’elle identifie comme des programmes « composés », soit des « des programmes qui comportent une partie de programmes achetés, préachetés, commandés et/ou coproduits par un tiers et une partie de programmes réalisé par la RTBF ». Sont déclarés comme programmes composés des contenus comme le Jardin extraordinaire, Les carnets du Bourlingueur, Retour aux sources, Crimes et Indices, etc. En 2020, ces programmes représentaient 4% du volume total de production propre de la RTBF, soit près de 436 heures (1h11 par jour) sur les trois chaînes.

Si en l’absence de précisions à ce sujet dans le Contrat de gestion, le CSA a jusqu’ici validé ces contenus au titre de production propre, leur statut pose question. En effet, le Contrat de gestion, s’inspirant directement du Décret SMA, définit la production propre comme les programmes « conçus par le personnel (de la RTBF), composés et réalisés par lui et sous son contrôle, ainsi que les programmes coproduits par la RTBF, au prorata du budget réellement engagé par elle.

Actuellement, aucun seuil d’implication de la RTBF n’est établi pour comptabiliser ou non un programme « composé » au titre de production propre. Or, si certains programmes comprennent en effet un ajout important de la RTBF (débat, présences d’invités, remontage, etc.) et pourraient donc être compris comme « conçus, réalisés et composés » par elle, à tout le moins en partie, d’autres programmes sont diffusés sans aucune autre modification que l’ajout d’un générique RTBF et/ou d’une rapide introduction par un animateur ou journaliste de l’éditeur[2]. Dans ce cas, il paraît difficilement concevable de pouvoir comptabiliser les programmes dans leur intégralité comme de la production propre, l’implication de la RTBF étant résiduelle.

La question se pose dès lors de la qualification de ces formats au titre de production propre : ceux-ci doivent-ils automatiquement être considérés comme de la production propre, peu importe le seuil d’investissement et d’implication de la RTBF ? Une prise en compte au prorata de l’investissement de l’éditeur serait-elle plus indiquée, comme cela est effectué actuellement pour les coproductions ? En l’état, une incohérence existe en effet au regard du statut réservé aux programmes coproduits : si un tel programme ne peut être comptabilisé comme de la production propre qu’au prorata du budget réellement investi par la RTBF dans celui-ci, il parait incohérent de pouvoir comptabiliser entièrement d’autres programmes dans lesquels la RTBF n’est impliquée que de manière extrêmement minoritaire. Pour plus de cohérence, le Contrat de gestion gagnerait dès lors à davantage préciser le mode de comptabilisation des programmes composés.

 

 Conclusions et recommandations

 

Afin de clarifier les différentes questions de production propre que soulève l’actuel Contrat de gestion, tant en termes de volumes, de manière de comptabiliser qu’en termes de ce qui est comptabilisé, le CSA recommande de préciser :

  • Le mode de comptabilisation et les services concernés par les seuils de 10 et 20h de production propre : vise-t-on une comptabilisation par service, ou pour tous les services pris cumulativement ? La comptabilisation actuelle des rediffusions, des programmes composés et de la radio filmée au titre de production propre semble indiquer que ces quotas devraient être rencontrés par service, à tout le moins en moyenne. Cette interprétation plus stricte permettrait de répondre au mieux à l’intention du législateur et à l’économie globale du Contrat de gestion, qui pose le principe d’un privilège donné à la production propre par la RTBF dans ses programmes.

 

  • Le statut :
    • Des rediffusions ;
    • De la radio filmée ;
    • Des programmes composés.

Ces trois formats jouissent actuellement d’une interprétation large et représentent à ce titre une part importante du volume de production propre de la RTBF. Si l’on décidait de maintenir cette interprétation large et d’inclure ces programmes dans le calcul de la production propre, il paraitrait cohérent d’adopter une vision plus stricte du mode comptabilisation des seuils à atteindre.

De manière plus globale, il s’agit de s’interroger sur le but poursuivi par l’obligation de diffusion de production propre de la RTBF : vise-t-on une diffusion élevée de contenus créés par la RTBF, le caractère inédit de ces formats étant secondaire, ou au contraire cherche-t-on à stimuler la création et la diffusion de nouveaux programmes produits en propres ? Dans le premier cas, une conception large des notions parait cohérente, dans le second il semblerait qu’une interprétation plus stricte soit indiquée.

 

[1] Art 3.2.1-4, §1, dernier alinéa du Décret SMA du 4 février 2021.
[2] A titre d’exemple, la RTBF déclarait en 2020 comme programmes composés -et donc comme production propre- des formats comme « Le Doc du Bourlingueur », constitué d’un documentaire externe d’une cinquantaine de minutes, auquel est ajouté un générique RTBF de 20 secondes ; ou encore « Crimes et Indices », constitué d’un contenu externe de 55 minutes en moyenne, auquel est ajouté un générique RTBF ainsi qu’une courte introduction d’une journaliste, représentant un peu plus d’une minute de programme.