Communications commerciales

Auvio

Introduction

La plateforme Auvio centralise l’offre audiovisuelle en ligne de la RTBF : programmes en direct et à la demande, inédits ou rediffusés. En date du 19 novembre 2020, la RTBF s’est déclarée en tant que distributeur de service auprès du CSA (voir chapitre spécifique). Auvio propose donc désormais également les catalogues non linéaires d’autres éditeurs locaux.

En six ans d’existence, la plateforme digitale de la RTBF n’a eu cesse d’évoluer tant au niveau du contenu que de ses fonctionnalités. Elle comptabilise 1.156.000 visiteurs uniques par mois (chiffres CIM Internet sept 2021 12+). À titre de comparaison, les derniers chiffres de RTL Play font état de 282.000 visiteurs uniques par mois (chiffres IPB 2021).

La RTBF assure donc sa position de catalyseur de la transition numérique en Fédération Wallonie Bruxelles. Selon les chiffres de son rapport annuel 2020, l’offre numérique de l’éditeur de service public touche 51,8 % de la population belge francophone de 12ans et + chaque mois, soit 2.245.000 personnes.

Auvio propose aujourd’hui diverses formes de communication commerciale notamment des pre-rolls, mid-rolls ou post-rolls (dénomination liée au positionnement de l’insert publicitaire par rapport au programme). Le succès croissant d’Auvio lui confère aujourd’hui une valeur média importante.

Contexte

En vertu de l’article 75 de son 5ème Contrat de gestion, la RTBF est autorisée à insérer des publicités sonores ou audiovisuelles dans le respect de la législation en la matière. L’article précise que la RTBF « est tenue d’identifier clairement les contenus publicitaires sur ses sites internet afin que l’internaute sache directement qu’il se trouve en présence de contenus publicitaires ». De surcroit, le Contrat de gestion précise que la RTBF ne peut insérer « aucune forme de publicité sous forme de pre-roll avant les programmes pour enfants accessibles dans l’offre de services de médias audiovisuels non linéaires ».

Le Décret relatif aux services de médias audiovisuels et aux services de partage de vidéos rappelle en son article 5.2-4 le principe de l’identification de la communication commerciale d’application dans les services linéaires et non linéaires, à savoir le fait que la publicité « doit être nettement distincte des programmes ou séquences de programme grâce à des moyens optiques ou acoustiques clairement identifiables ».

Le décret précise également des règles d’application aux services télévisuels linéaires et non linéaires :

  • L’insertion de communication commerciale ne peut porter atteinte à l’intégrité et à la valeur des programmes et doit tenir compte des interruptions naturelles ainsi que de la durée et de la nature des programmes et ne pas porter préjudice aux droits des ayants droit. (art. 5.3-1 §1)
  • Une communication commerciale ne peut venir interrompre une œuvre dont l’auteur souhaite conserver l’intégrité ni une séquence d’un programme. (art. 5.3-1 §2)
  • Les journaux télévisés, programmes pour enfants ne peuvent contenir de communication commerciale. (art. 5.3-1 §3)
  • Les spots « isolés » (ni précédés ni suivis par un autre spot) de publicité et autopromotion doivent être exceptionnels sauf lors de diffusion de manifestations sportives. (art. 5.3-2)

Quant aux services sonores, il est précisé que les communications commerciales « ne peuvent venir interrompre les programmes d’art lyrique ou dramatique, sauf durant les interruptions naturelles, ni être insérées dans les journaux parlés et programmes pour enfants » (art. 5.4-1-2), une règle qui s’applique aussi bien au linéaire qu’au non linéaire.

Concernant la durée des interruptions commerciales au sein des services télévisuels et sonores non linéaires, le Décret indique une règle spécifique, à savoir que « le temps maximum de la publicité et des spots de télé-achat insérés dans un programme est fixé à 20 % de la durée de ce programme ». Le Gouvernement peut de surcroit fixer un pourcentage inférieur (art. 5.3-3 §2 et art. 5.4-1 §2).

Anticipant les questions juridiques posées par le développement des nouvelles formes de communication commerciale liées aux services de médias audiovisuels distribués sur Internet, le Collège d’autorisation et de contrôle du CSA a adopté en 2015 une Recommandation relative aux communications commerciales sur les plateformes internet afin de transposer aux environnements non linéaires les balises fixées par la législation publicitaire applicable. Cette démarche visait, dans une perspective d’égalité de traitement, à garantir le respect, par les éditeurs, des principes de confort de visionnage et de protection des consommateurs. Cette Recommandation pose quatre enjeux majeurs toujours d’actualité, à savoir : la nécessité d’une séparation et d’une identification claire de la publicité, le respect de l’intégrité de l’œuvre, l’interdiction d’associer de la publicité à certains types de programmes (journaux télévisés et programmes pour enfants), et enfin, la transposition aux services non linéaires des règles de durée publicitaire.

Bilan

L’offre non linéaire de la RTBF fait l’objet d’un suivi régulier de la part du CSA à l’occasion de ses contrôles annuels. Globalement, le régulateur salue le développement par la RTBF de sa présence sur internet, au travers d’Auvio, des plateformes de partage de vidéo ou des réseaux sociaux. Ces démarches assurent la visibilité de l’éditeur auprès des publics délaissant les médias traditionnels.

Concernant les communications commerciales sur Auvio, l’enjeu fondamental est l’adéquation de la législation avec les pratiques actuelles sur les services non linéaires. Le CSA considère que certains grands principes de la régulation en matière de communication commerciale acquis dans l’environnement linéaire doivent pouvoir être transposés dans les nouveaux écosystèmes numériques.

 Monitoring des communications commerciales sur Auvio

Le CSA a réalisé un monitoring qualitatif des pratiques commerciales sur la plateforme Auvio afin de dresser un état des lieux en amont de l’élaboration du nouveau Contrat de gestion. La présente analyse se fonde également sur une présentation de la plateforme Auvio faite au CSA par la RMB le 19 mars 2021, ainsi que sur les travaux du Secrétariat d’instruction ayant notamment conduit à la décision du 8 juillet 2021 (deux griefs établis suite à trois plaintes relatives à la communication commerciale sur les différentes radios internet de la RTBF – notamment La Première, Vivacité et Classic 21) par laquelle le Collège a décidé de surseoir à statuer quant à la sanction jusqu’à l’adoption du prochain Contrat de gestion de la RTBF.

Note méthodologique : les observations ont été effectuées en janvier et février 2022. Elles ont porté sur des programmes audiovisuels et sonores disponibles sur tous supports : PC, tablette et smartphone. En outre, différents types de programmes ont été monitorés : à la demande, en direct, exclusifs, en intégralité et séquencé.

Le CSA souligne les difficultés inhérentes aux monitorings de services non linéaires, la principale étant la personnalisation de l’expérience, à savoir le fait que l’utilisateur se verra proposer des communications commerciales différentes selon son profil, ses habitudes de consommation ou l’appareil de visionnage utilisé. Par exemple, lorsque l’on procède à un monitoring, le fait de passer d’un programme (ou d’une séquence de programme) à un autre sans consommer la totalité du programme va en général générer plus d’exposition publicitaire qu’un.e internaut.e qui se connecte pour consommer un programme en entier. Une seconde difficulté réside dans ce qui s’apparente à une certaine instabilité technique de la plateforme, typiquement une interruption de flux due à une coupure de la connexion, une relance de flux suite à une pause sont des situations pouvant induire une surexposition publicitaire.

Enfin, lors de ces séances de visionnage, des expériences utilisateurs très différentes ont pu être observées, trois exemples ci-dessous :

  • La série documentaire sonore « L’Effet Stromae[1]» : 10 épisodes de 11 à 18 minutes, 2 pré-roll avant chaque épisode, pas de mid-roll – total : 20 publicités (avec un très haut taux de rotation[2]) sur 144 minutes de programme ;
  • La mini-série « Messieurs Pipi[3]» : 10 épisodes de 3-4 minutes, 3 pré-roll sur les 10 épisodes de la saison 1 regardée sans interruption, pas de mid-roll – total : 3 publicités (dont une auto-promotion) vues sur 37 minutes et 55 secondes de programme ;
  • La série « Pandore[4]» : 10 épisodes d’environ 50 minutes, sur la totalité de la première saison, 8 publicités ont été vues, la plupart du temps en pré-roll. Presque tous les épisodes sont interrompus d’un mid-roll (qui correspond à l’interruption en linéaire) sans publicité (présence uniquement d’un jingle « in » et d’un « jingle out ») – total : 8 publicités vues sur environ 499 minutes de programme ;

Comme on le voit dans ces exemples, il est donc assez difficile de tirer des constats généraux sur les pratiques publicitaires actuellement en vigueur sur Auvio.

 

Séparation et identification claire de la publicité

Actuellement la pratique est différente qu’il s’agisse de pré-roll ou de mid-roll :

  • Pré-roll : la diffusion de pré-roll est exempte de jingle ou virgule visuel(le) et/ou sonore indiquant qu’il s’agit d’une publicité, elle n’est d’ailleurs pas décrite comme telle mais on peut lire la mention « votre contenu démarrera dans xx secondes» ;
  • Mid-roll : en revanche, le mid-roll est précédé et suivi d’un jingle visuel et sonore d’un peu plus de 3 secondes, l’interruption publicitaire est ainsi rallongée d’environ 7 secondes par l’usage du jingle « in » et du jingle « out ».

La majorité des programmes disponibles sur Auvio, qu’ils soient audiovisuels ou sonores, sont précédés d’un pré-roll au lancement (y compris en cas de visionnage en direct). Un pré-roll (souvent le même) apparait aussi au redémarrage du flux après une interruption involontaire (de nombreux arrêts inopinés du programme en cours ont ainsi pu être constatés), une mise sur pause volontaire, une accélération du flux ou encore une perte de connexion.

Le CSA rappelle la nécessité de séparer et d’identifier les contenus publicitaires au moyen d’une technique qui se superpose à l’insertion publicitaire sans en allonger la durée. Ainsi, la Recommandation privilégie l’affichage d’une mention « publicité » en toutes lettres. La pratique actuelle sur Auvio, à savoir l’apparition de la mention « votre contenu démarrera dans xx secondes », apparait cependant comme rencontrant l’objectif. A contrario, l’ajout d’une identification sonore (virgule ou jingle) comme c’est le cas pour les mid-rolls allonge l’interruption du programme consommé, ce qui n’est pas en adéquation avec la rapidité des modes de consommation en ligne et avec l’ergonomie des interfaces mais qui a le mérite de bien signaler le caractère publicitaire de l’interruption.

 

Interruption et respect de l’intégrité des programmes

Le CSA constate que les interruptions publicitaires interviennent aux mêmes moments en linéaire et en non linéaire. Plusieurs programmes diffusés en préalable sur un service linéaire ont ainsi été analysés : les interruptions par des mid-rolls sur Auvio correspondaient aux interruptions par des tunnels publicitaires en linéaire. Par ailleurs, aucun mid-roll n’a été identifié sur des programmes proposés en exclusivité sur Auvio.

Les interruptions constatées dans les programmes diffusés en non-linéaire sur Auvio semblent donc en phase avec celles intervenant lors de la diffusion en linéaire. Toutefois, vu les pratiques constatées sur d’autres plateformes, et vu la possibilité laissée à la RTBF d’insérer de la communication commerciale au sein de programmes exclusivement proposés sur Auvio, il parait pertinent, afin de garantir le confort de visionnage et l’intégrité des programmes, que le Contrat de gestion rappelle certaines balises, notamment le fait que l’insertion de mid-roll ne peut intervenir qu’entre séquences distinctes d’un même programme afin de ne pas nuire au déroulé d’un programme, en évitant, par exemple, d’interrompre le déroulement des dialogues ou de l’action.

 

Interdiction de la publicité liée à certains types de programmes

Programmes pour enfants : le CSA constate qu’aucune publicité n’est associée aux programmes pour enfants proposés sur Auvio. La RTBF respecte dès lors le prescrit du Contrat de gestion.

Programmes d’information : la présence de pré-roll parait systématique dans le cas des journaux télévisés, qu’ils soient proposés en intégralité ou par séquences. Il en va de même lors de la relance, en cours de visionnage, d’un journal télévisé après une interruption volontaire (accélération, pause, …) ou involontaire (bug). Cette pratique pose question par rapport à l’interdiction de diffuser de la publicité dans les journaux télévisés (art. 5.3-1§ 3 et art. 5.4-2 du Décret SMA).

On estime en non-linéaire que le pré-roll n’est pas inséré dans le programme qu’il précède. Toutefois, la diffusion d’un pré-roll suite à une interruption introduit de facto de la communication commerciale au sein des programmes d’information.

Pour rappel, le législateur belge francophone interdit l’insertion de publicités dans les journaux télévisés et dans les programmes pour enfants. Il paraitrait dès lors cohérent que ces interdictions soient transposées aux services non linéaires.

 

Durée publicitaire et possibilité d’interrompre la publicité

Le CSA constate la rediffusion fréquente de mêmes spots parfois dans un temps très court (moins de quelques minutes). Ainsi, une même publicité peut être diffusée au lancement du programme puis, comme déjà évoqué au point précédent, après réactivation du flux soit volontaire, soit involontaire. Ces répétitions peuvent également intervenir lors d’une même session, lorsque l’internaute visionne plusieurs séquences les unes à la suite des autres. Au regard de plaintes et questions reçues par le CSA, ces répétitions de spots publicitaires dans un bref laps de temps peuvent être perçues comme intempestives et intrusives.

Le décret SMA spécifie que la durée publicitaire maximale de 20% se calcule, en non linéaire, par rapport à la durée du programme et non par rapport à l’heure horloge. Concernant les vidéos de courte durée, la Recommandation du Collège n’exclut cependant pas la communication commerciale – ni que cette communication commerciale dépasse potentiellement 20 % de la durée du programme – pour autant que l’utilisateur garde la possibilité d’interrompre la communication commerciale et ne soit dès lors pas contraint de s’y exposer plus du temps nécessaire à la procédure d’interruption. En outre, le Collège considère que la démarche active consistant à éviter une publicité en la fermant peut être envisagée, sous certaines conditions, comme une technique de séparation.

 

 Conclusions et Recommandations

 

D’après la législation linéaire et les constats qu’il a pu faire sur Auvio, le CSA formule les recommandations suivantes pour la rédaction du nouveau Contrat de gestion afin de garantir les principes de confort de visionnage et de protection des consommateurs :

  • Permettre à l’internaute d’interrompre la diffusion de publicités au moyen d’un bouton permettant de “skipper” la pub après quelques secondes ;
  • Interdire l’insertion de publicité dans les journaux parlés/télévisés ou séquences de journaux sous la forme de pré-roll au redémarrage du flux ;
  • Jeter les bases d’une interdiction complète de diffuser des pré-roll (et à plus forte raison des mid-roll) avant et dans les programmes d’information ;
  • Éviter les répétitions publicitaires dans des laps de temps courts (par exemple une période de minimum 15 minutes), y compris lorsque l’internaute passe d’un contenu à un autre (et pas uniquement lorsqu’il.elle visionne un programme long ou plusieurs épisodes d’un même programme / série).
  • Rappeler la nécessité de respecter les séquences distinctes d’un programme pour l’insertion de mid-rolls.
 
[1] Consommation sur smartphone et PC.
[2] 20 spots pour quatre marques différentes : 10 occurrences d’un spot pour C&A, 8 occurrences d’un spot pour Minimax, 1 occurrence d’un spot pour CBC et 1 occurrence d’un spot pour le Lotto.
[3] Consommation sur PC.
[4] Consommation sur tablette.

Matinale de La Première

Contexte

La Déclaration de politique communautaire pour 2019-2024[1] prévoit qu’afin d’assurer « un service audiovisuel public moteur de la diversité culturelle et acteur de l’espace démocratique, le Gouvernement souhaite : (…) Renforcer les mesures de limitation de la publicité à la RTBF :

  • en radio en commençant par la tranche matinale de la Première ;
  • (…) ».

Depuis le 1er juillet 2021, un avenant à l’article 72.9 du Contrat de gestion de la RTBF interdit la diffusion de publicité sur la tranche 6h-9h de La Première. L’avenant précise cependant que : « (…) ne sont pas visés par cette interdiction :

  • les messages promotionnels en faveur de la presse écrite imprimée, du cinéma et des institutions culturelles, dans le cadre des échanges promotionnels visés par le présent Contrat de gestion ;
  • les messages institutionnels, émanant des pouvoirs publics ou d’organisations non-gouvernementales, promotionnant un message d’intérêt général (éducation, santé publique, citoyenneté, solidarité, …), en ce compris les messages d’éducation à la santé diffusés gratuitement à la demande du Gouvernement;
  • les messages diffusés gratuitement en faveur des œuvres de bienfaisance.»

La mise en œuvre de cette mesure a d’abord fait l’objet d’une phase de transition de septembre 2020 à juin 2021, tel que prévu à l’article 72.8, au cours de laquelle la durée maximale de diffusion de publicité a été réduite de moitié (6 minutes par heure de transmission). Cette transition avait pour but de limiter l’impact budgétaire de la mesure sur le budget 2020 de la RTBF dans le contexte de la crise sanitaire.

Il est important de souligner que dans le Contrat de gestion en vigueur, seule la publicité commerciale est interdite dans la matinale de La Première. Le parrainage, autre forme de communication commerciale, reste donc autorisé. Ainsi, via le parrainage, des annonceurs commerciaux n’entrant pas dans le périmètre des exceptions à l’interdiction (culture, cinéma, presse écrite, message institutionnel, œuvres de bienfaisance) gardent une fenêtre de visibilité dans la matinale.

[1] Déclaration de Politique Fédération Wallonie-Bruxelles 2019 – 2024, chapitre 12 « Médias », p.45

Bilan

Le CSA a réalisé un monitoring de la matinale en FM sur deux fois 5 jours (du lundi 13 au vendredi 17 décembre 2021 et du lundi 17 au vendredi 21 janvier 2022). Son objectif était de faire un état des lieux six mois après l’entrée en vigueur de l’article 72.9.

Sur les trente heures écoutées (10 matinales), 298 messages apparemment promotionnels ont été identifiés. Ces messages concernent principalement du parrainage commercial (111 occurrences), de la promotion culturelle au sens large (51 occurrences), des messages institutionnels (49 occurrences), des publicités pour des titres de la presse écrite (25 occurrences), de l’autopromotion pour le site internet de la RTBF (18 occurrences), pour des programmes de La Première (16 occurrences) et pour la plateforme Auvio (13 occurrences). Des titres de la presse écrite sont aussi souvent mentionnés en tant que partenaires d’évènements culturels.

Concernant la durée de ces messages par rapport à la durée totale de la matinale, en moyenne sur les dix jours monitorés, environ 9 minutes de messages promotionnels ont été diffusées par matinale de 180 minutes, soit près de 5%.

 

Promotion de la culture

Une publicité monitorée apparait problématique car son rattachement au périmètre de l’exception pour des messages promotionnels en faveur des institutions culturelles n’est pas évident. Il s’agit d’une publicité pour trois concerts de Stromae à Bruxelles (en collaboration avec La Première) renvoyant vers le site pour réservation. Elle a été entendue 10 fois dans une période de trois jours consécutifs, dont 5 fois dans une seule matinale. Il n’est pas évident que le chanteur, l’opérateur de sa tournée ou les salles de concert dans lesquelles il se produit puissent être considérés comme des institutions culturelles pouvant bénéficier de l’exception.

Si l’intention du législateur est que cette exception vise à promouvoir les institutions culturelles ayant une faible visibilité, alors des messages promotionnels pour des artistes de grande renommée tels que Stromae ne devraient pouvoir en bénéficier. Le monitoring a relevé de nombreux messages en faveur de telles institutions culturelles : des pièces de théâtres, des spectacles de danse ou des expositions de peinture, etc. Ces annonces promotionnelles entendues régulièrement dans la matinale (51 occurrences) représentent 17% de toutes les communications identifiées sur les dix jours de monitoring (298 occurrences). En comparaison, l’annonce pour Stromae (10 occurrences) en représente à elle seule 3%.

 

Messages institutionnels

Ce type de message émane des pouvoirs publics ou d’organisations non-gouvernementales. Le Contrat de gestion précise qu’il doit promouvoir “ … un message d’intérêt général (éducation, santé publique, citoyenneté, solidarité, …), en ce compris les messages d’éducation à la santé …”

Parmi les messages entendus, une majorité provient du gouvernement fédéral et concerne la crise Covid. Deux autres messages entendus à plusieurs reprises interrogent sur l’objectif d’intérêt général prévalant à l’exception :

  • Un message de l’Apaq-W et l’UE pour la promotion des produits alimentaires labélisés “produits du terroir”.
  • Un message de la Stib pour souhaiter de joyeuses fêtes de fin d’année.

Parrainages commerciaux

Les parrainages sont des communications commerciales associées à des programmes, séquences et autopromotions.

Ils sont nombreux dans le monitoring effectué par le CSA, mais respectent les règles du Décret tant pour la durée (10 secondes maximum) que le nombre (6 annonces maximum par heure). Quelques annonceurs entendus : Dovy (cuisiniste), Skoda (voiture), Chimay (Bières et fromages), Belfius (banque), Lactel (lait), Minimax (adoucisseur d’eau).

Dans la matinale, ces parrainages concernent majoritairement l’info-trafic et la météo mais aussi de l’autopromotion. En effet, une autopromotion pour le programme de la RTBF en TV “les Belges du bout du monde” a été diffusée 9 fois lors de la semaine de décembre, toujours suivie d’un parrainage par Chimay (bières et fromages).

La promotion pour l’événement caritatif de la RTBF “Viva For Life” est systématiquement suivie d’une communication pour certains partenaires privés de l’opération. Ces communications personnalisées pour chaque annonceur dépassent de loin la simple citation de partenaire intégrée classiquement en fin d’une promotion. Étant donné leur forme élaborée et du fait qu’elles sont séparées de la promotion, ces communications peuvent potentiellement être assimilées à du parrainage.

En tout état de cause, la diffusion de ces annonces de parrainage dans la matinale, bien que respectant le Décret et le Contrat de gestion, exposent les auditeur.rice.s à un nombre important de messages à finalité commerciale et donne bien l’impression au public que la matinale « sans publicités » comprend des publicités.

Publicité commerciale

Pour terminer, une infraction manifeste à l’art. 72.9 a été constatée, l’annonceur ne pouvant être rattaché ni de près, ni de loin au périmètre des exceptions. Il s’agit d’une publicité pour un centre de loisir et de vacances diffusée une fois par matinale pendant 4 jours successifs (du 14 au 17 décembre 2021) du monitoring réalisé. Le constat a été transmis au Secrétariat d’instruction du CSA[1].

 

 Conclusions et recommandations

 

Force est de constater que les auditeurs et auditrices sont encore exposé.e.s à des interruptions publicitaires lorsqu’il.elle.s écoutent la matinale même si ces annonces ne sont pas toutes à caractère commercial.

Le monitoring a en effet relevé un nombre significatif d’interruptions et notamment de parrainages commerciaux. Le CSA se pose d’ailleurs la question de savoir si la règle actuelle (interdiction de diffusion de publicité commerciale mais pas d’interdiction de parrainage commercial) ne risque pas de mener à une diffusion excessive -dans la matinale- de séquences[2] et annonces promotionnelles parrainées afin de contrebalancer le manque à gagner en matière de rentrées publicitaires. Le CSA constate en outre que le parrainage -par le même annonceur- de séquences telles que la météo ou l’info-trafic entraine une répétition d’annonces identiques qui peut provoquer un sentiment de saturation chez les auditeur.rice.s.

Si la volonté du législateur est de n’exposer aucune marque commerciale dans la matinale de La Première, le CSA suggère donc de remplacer -dans le Contrat de gestion- le terme « publicité » par les termes « communication commerciale », termes qui recouvrent également le parrainage.

Enfin, concernant la promotion d’institutions culturelles, si l’exception vise la promotion d’acteurs culturels moins visibles et médiatisés, le Contrat de gestion pourrait inclure une disposition explicite le précisant. La RTBF pourrait ainsi faire en sorte que cette exception profite prioritairement aux institutions en manque d’exposition et non à des évènements déjà très médiatisés, même si l’éditeur est partenaire de ces derniers.

[1] À ce sujet, la RTBF a indiqué qu’il s’agissait d’une erreur de programmation.
[2] À titre d’exemple, depuis février 2022, la RTBF diffuse à 8h30 une capsule d’une minute « 60 secondes pour l’avenir » parrainée par BNP Paribas Fortis (Banque et assurances), une autopromotion pour cette capsule, également parrainée, est diffusée environ 1 heure plus tôt.

Journalistes et influenceurs

 

Introduction

L’utilisation des plateformes de médias sociaux à des fins d’information ne cesse de croitre et cela plus fortement encore auprès des jeunes. Environ 78 % des Belges s’informent régulièrement en ligne et plus particulièrement sur les réseaux sociaux et auprès de personnalités influentes (Digital News Report Reuters, 2021).  Dans ce contexte, les contenus diffusés par des agents de la RTBF, contractuels ou non, doivent rester cohérents avec les missions de la RTBF et ne pas créer de confusion entre le champ de l’information et celui de la communication commerciale. S’il semble aller de soi que les journalistes d’information doivent respecter la déontologie journalistique et donc ne pas prêter leur concours à des communications commerciales, cela n’est de toute évidence pas le cas de certain.es chroniqueurs.euses ou présentateur.trices de la RTBF, et ce, au détriment de l’indépendance de son information et de la confiance des publics.

Contexte

Par souci d’encadrement déontologique et afin de garantir, dans tous ses services audiovisuels, la qualité, la rigueur, l’indépendance et la confiance que le public est en droit d’attendre et en vertu de l’article 7.4 de son Contrat de gestion, la RTBF s’engage à respecter le code de déontologie, les avis, recommandations et décisions du Conseil de déontologie journalistique de la Fédération Wallonie-Bruxelles, dont la RTBF est membre actif. Déontologie que les journalistes sont tenus de respecter « quel que soit le support, y compris dans l’utilisation professionnelle des réseaux sociaux, sites personnels et blogs comme sources d’information et comme vecteurs de diffusion de l’information » (Code de déontologie, article 7). Les journalistes « n’exercent aucune activité pour le compte de tiers si cette activité porte atteinte à leur indépendance » (Code, article 12). De plus, les journalistes « ne prêtent pas leur concours à des activités de publicité ou de communication non journalistique. » (Code, article 13).

Par ailleurs, la Recommandation relative aux programmes d’information prise par le Collège d’autorisation et de contrôle du CSA en 2015 clarifie la notion de programme d’information et les obligations liées à ce type de contenu telles que définies par la législation en vigueur.  La Recommandation précise que « les contenus d’un programme d’information ont fait ou font l’objet d’un traitement journalistique. Le travail journalistique n’est pas obligatoirement réalisé par un journaliste professionnel ni de formation. (…) Si l’information relève d’une préoccupation d’intérêt général, c’est parce que ses contenus doivent répondre à l’intérêt du public qui en est le destinataire. L’information exclut les intérêts particuliers. En ce sens, elle se distingue de la publicité et de ses formes dérivées (publi-reportage, « native advertising », etc.) ainsi que des activités de communication qui répondent plus spécifiquement à l’intérêt des émetteurs ».

Concernant les recettes commerciales et comme décrit à l’article 70.1 du Contrat de gestion, « la RTBF est autorisée à effectuer les activités commerciales suivantes :  la vente d’espaces publicitaires, en ce compris sous formes de publicité, de parrainage, de placement de produits, d’aide à la production, de jeux et de concours et d’autres opérations publicitaires et commerciales, dans ses services audiovisuels, en ce compris sur internet et sur les réseaux et médias sociaux, dans le respect des lois, des décrets, des arrêtés et du présent Contrat de gestion. » Il est toutefois précisé que « les recettes générées par ces activités commerciales constituent des recettes commerciales, dont le revenu net est affecté à la réalisation des missions de service public de la RTBF » (article 70.4).

Pour ses services de médias audiovisuels non linéaires (article 72.1), sans préjudice des dispositions décrétales, la RTBF respecte de surcroit les règles particulières suivantes :

  • La communication publicitaire respecte les codes d’éthique énoncés par le CSA ;
  • Il ne peut être fait appel, pour la partie sonore ou visuelle d’un message de publicité commerciale, aux journalistes engagés par la RTBF en qualité d’agents statutaires ou contractuels, ni aux animateurs, sauf, en ce qui concerne ceux-ci, dérogation accordée par l’administrateur général de la RTBF.

Bilan

Le présent Contrat de gestion parait désuet quant aux usages actuels en matière de communications commerciales sur les réseaux sociaux et les devoirs et obligations des agents de la RTBF.

Le cadre juridique des pratiques commerciales sur les réseaux sociaux pourrait être précisé et renforcé dans le nouveau Contrat de gestion afin d’être notamment en cohérence avec la règlementation du Conseil de Déontologie journalistique et d’éviter ainsi toute confusion entre information et publicité.

Au vu de la situation actuelle, il serait utile de clarifier les statuts internes des journalistes et des métiers de l’animation propres à la RTBF et de différencier les pratiques et les obligations qui en découlent. Aussi, si on se réfère à l’article 72.1 seuls les animateurs.trices ont la possibilité de bénéficier d’une dérogation de l’administrateur général pour faire de la communication commerciale, et non les journalistes. Mais qu’en est-il des statuts hybrides ? En effet, après consultation de l’annuaire de l’AJP, il s’avère que certain.es animateurs.trices et chroniqueurs.euses vedettes de la RTBF bénéficient d’un statut de journaliste et d’une carte de presse.

Si les journalistes de la RTBF sont soumis au bon respect du Code de déontologie journalistique et semblent ne pas s’adonner à des communications commerciales sur leurs réseaux sociaux personnels, il n’en va pas de même pour tout le monde. Certain.es animateurs.trices indiquent des mentions commerciales sur leurs publications voire affichent clairement leur casquette de créateurs de contenus. Il pourrait être considéré que ces agents vont à l’encontre des missions de services publiques de la RTBF en prêtant leur image à des fins publicitaires qu’elles soient rémunérées ou non.

Par ailleurs, il s’avère que des animateurs.trices de la RTBF sont sous contrat d’influenceurs via la RMB et sa cellule F.L.A.S.H. Outre la problématique de la déontologie, il est important, dans ce cas précis, de veiller à ce que les revenus nets soient bien affectés à la réalisation des missions tel que prévu par le Contrat de gestion (article 70.4) et communiqués annuellement de manière transparente au Conseil d’Administration (article 7.4).

 

Conclusions et Recommandations

 

Au vu de l’évolution des usages en matière de consommation médiatique et afin de garantir l’indépendance de l’information et la confiance des publics de la RTBF, le CSA recommande de :

  • Mettre à jour le Contrat de gestion afin d’élargir l’interdiction d’activités ou mentions commerciales aux pages et comptes personnels des agents sur les plateformes internet ;
  • Dans cette optique, clarifier les catégories du personnel de la RTBF : journalistes, chroniqueurs.euses, présentateur.trices ou statut hybride – afin de dresser les obligations propres à chaque catégorie (si différence il doit y avoir) ;
  • Transposer ces catégories dans les statuts du personnel et dans une clause du contrat de travail ;
  • Clarifier en quoi consiste et quelles sont les conditions d’octroi de la dérogation prévue par l’article 72.1 qui peut être délivrée par l’administrateur général de la RTBF ;
  • Fixer une clause de rendez-vous au Conseil d’Administration afin de lui faire rapport -de manière régulière- sur le régime d’autorégulation des activités commerciales du personnel de la RTBF